L’élasticité est un concept essentiel dans l’analyse économique. Des énoncés qui prendraient une tournure compliquée deviennent simples lorsque l’on utilise ce concept. Il peut être important pour un vendeur de ciment de savoir l’impact que pourrait avoir une augmentation du prix de ciment sur le bénéfice qu’il réaliserait. Une augmentation de prix pourrait par exemple provenir d’un déplacement de la courbe d’offre de ciment vers la gauche. Ce déplacement à son tour peut être dû au retrait de nombreux vendeurs du marché par suite de l’apparition de nouvelles activités. Le vendeur voudrait aussi savoir l’impact d’une augmentation des revenus des consommateurs sur la consommation du ciment. Une telle information pourrait par exemple être utilisée pour le choix de la localisation du lieu de vente entre les différents quartiers de la ville. L’élasticité prix ou l’élasticité revenu lui permettront de facilement percevoir les effets de ces deux évènements.
III.2.1. L’Elasticité-prix de la demande
III.2.1.1. Concept, définition et calcul d’élasticité
Selon la loi de la demande, lorsque le prix d’un bien augmente, la quantité demandée de ce bien diminue. La loi de la demande donne ainsi le sens de la variation de la quantité par suite d’une variation du prix. Mais cette loi ne donne pas l’amplitude de la baisse de la quantité demandée par suite de l’augmentation du prix. Cette ampleur dépendra de la capacité de réaction de la demande à un changement de prix.
L’élasticité-prix de la demande, notée souvent par e, est définie comme la variation en pourcentage de la quantité demandée divisée par la variation en pourcentage du prix:
En utilisant les données qui nous ont servi à faire les analyses des indices, nous aurons les élasticités-prix de la demande reprises dans le tableau ci-après sur toutes les années d’observation :
Source : Nos calculs à partir des données de l’annexe 1
Dans le premier cas, c’est-à-dire 2012, nous avons une élasticité-prix[1] de la demande de 6,56% et nous pourrons dire qu’une augmentation de prix de 1% de 2011 à 2012 s’est accompagnée d’une diminution de la quantité demandée de 6,56% ; de même que dans le deuxième cas, c’est-à-dire 2013, une augmentation de prix de 1% de 2012 à 2013 s’est accompagnée d’une diminution de la quantité demandé de 9,78%. Pour le troisième cas, c’est-à-dire 2014, nous avons une élasticité prix de la demande de 5,41% et nous pourrions de même dire qu’une augmentation de prix de 1% de 2013 à 2014 s’est accompagnée d’une diminution de 5,41% de la quantité demandée.
Ainsi donc, depuis la relance des activités à Cimenterie IK en 2011, nous assistons chaque année à une augmentation du prix de vente du ciment, laquelle augmentation s’accompagne par une baisse de la quantité demandée et donc une baisse de vente ou d’écoulement du ciment de la firme. Nous pourrions donc dire que la hausse du prix de vente du ciment à la cimenterie IK est un phénomène grave quant à la pérennité de la firme à long terme, puisqu’à certain niveau de prix les consommateurs ou acheteurs du ciment n’achèteront plus et se contenteront d’acheter le ciment importé qui généralement est vendu un prix bas par rapport à celui de la cimenterie, car à chaque niveau de hausse de prix nous avons assisté à une perte de la clientèle pour la cimenterie.
En mathématique, la variation en % de la variable x s’écrit : variation en % de , où l’opérateur indique la différence entre deux valeurs de x: , où x1 et x0 sont deux valeurs données de x. En utilisant l’opérateur, la formule de l’élasticité est : , où q représente la quantité demandée et p le prix d’un bien. Notons qu’en réalité q et p sont de signes opposés (loi de la demande) et l’élasticité ainsi définie est négative. On considère la valeur absolue de e, même si dans l’interprétation on tient compte du signe négatif.
III.2.1.2. Classification des biens selon l’élasticité[2]
La valeur 1 est utilisée comme point de rupture pour la comparaison des biens selon l’élasticité Ainsi :
Il existe deux cas extrêmes. Dans le premier, une variation du prix entraîne une variation illimitée de la quantité. On dit que la demande est infiniment (parfaitement) élastique. En particulier, la moindre hausse du prix se traduit par la baisse de la quantité à zéro, alors que la moindre baisse du prix se traduit par une hausse infinie de la quantité. Dans le deuxième cas, une variation du prix laisse la quantité inchangée. On dit que la demande est parfaitement inélastique ou encore d’élasticité nulle.
Nous pouvons donc ainsi dire avec aisance que le ciment est un bien élastique par le fait que la valeur de ses élasticités est supérieure à 1.
III.2.1.3. Elasticité-prix et recettes
La cimenterie IK sera toujours intéressée par l’effet d’une variation des prix sur ses recettes (ventes en argent). Les recettes d’une entreprise sont la quantité vendue multipliée par le prix :
Si le prix augmente de 1%, les recettes diminueront si la quantité diminue de plus de 1 %. Les recettes augmentent si la quantité diminue de moins de 1%. On peut utiliser l’élasticité pour exprimer ce résultat.
Ce résultat est tout à fait logique. Lorsque la demande est inélastique, le consommateur est « prisonnier » de ses goûts : il ne peut pas réagir face à des changements. Par conséquent, l’augmentation ou la diminution du prix laisse ses quantités achetées presque invariables. Par contre, quand la demande est élastique, le consommateur est à même de s’ajuster. Une augmentation du prix le fera « fuir » le produit. Un exemple de bien à demande inélastique est l’alimentation prise en tant que groupe. Tout consommateur est obligé de se nourrir et l’augmentation ou la diminution du prix aura peu d’impact pour beaucoup de gens.
Les entreprises doivent se préoccuper du niveau de l’élasticité-prix de la demande pour leurs décisions.
III.2.1.4. Elasticité et pente de la courbe
Le niveau de l’élasticité dépend de la forme de la courbe de demande. Lorsque la courbe de demande est une droite, cette forme dépend entièrement de la pente de la courbe. Cette courbe de demande est représentée par une équation de la forme :
avec P le prix et Q la quantité. Les valeurs de a et de b définissent entièrement la droite. On peut « inverser » l’équation de la courbe pour obtenir le prix à partir d’une quantité de ciment. L’équation est :
Avec le prix en ordonnée, la pente de la droite correspond à celle de l’équation (2). La pente de cette équation est définie comme suit :
En reprenant la formule mathématique de l’élasticité :
D’où la relation entre l’élasticité et la pente :
La pente donnée par 1/b est constante le long de la droite. Mais l’élasticité dépend du rapport p/Q : elle est forte pour les petites valeurs de la demande et faible pour les grandes valeurs de la demande. Notons que pour deux courbes données, si le rapport p/Q est le même (ce qui est le cas quand les deux courbes se croisent), la courbe ayant la plus forte élasticité est celle ayant la plus faible pente (1/b) : Si 1/b est faible, alors b est élevé, conduisant à une plus forte valeur de e étant donné p/Q.
Pour appliquer la formule, prenons le cas des années 2012, 2013 et 2014 pour lesquelles nous avons déterminé les élasticités-prix de la demande. Nous pouvons donc simplifier ces calculs à travers le tableau 23 nous permettant de déterminer les équations de demande adressées à la firme pour les années considérées. Ainsi, nous aurons :
Source : Nos calculs à partir des données du tableau 24
Nous pouvons également constaté à travers ce tableau, la baisse des quantités demandées adressées à la firme (cimenterie IK) suite à la variation du prix de vente de cette dernière depuis l’année 2012 à ce jour. Ainsi donc, de 739,4 tonnes demandées en 2012, la demande a baissé à 531,01 tonnes en 2013 et à 431,99 tonnes en 2014.
III.2.2. Elasticité-prix de l’Offre[3]
III.2.2.1. Définition
Pour formuler un jugement quantitatif sur la modification de la quantité offerte par suite d’une modification du prix, on utilise le concept d’élasticité-prix de l’offre. Il s’agit du même concept que l’élasticité-prix de la demande. Par simplicité, on utilisera l’expression élasticité de l’offre. L’élasticité de l’offre est définie comme suit :
En écriture symbolique, l’élasticité de l’offre se définit comme suit :
En général on peut qualifier la réponse de l’offre selon la valeur de l’élasticité.[4]
La nature de l’offre joue un rôle important dans les politiques nationales. Cette nature dépend des biens et de l’échelle de production.
Source : Nos calculs à partir des données de l’annexe 1
Dans le premier cas, c’est-à-dire 2012, nous avons une élasticité de l’offre de 1,90% et nous pourrons dire qu’une augmentation de prix de 1% de 2011 à 2012 s’est accompagnée d’une augmentation de la quantité offerte de 1,90% ; à ce niveau, l’offre du ciment de la cimenterie IK était élastique car la valeur de son élasticité était supérieure à 1. Néanmoins, dans le second cas, c’est-à-dire 2013, nous avons une élasticité de l’offre de -9,10% et nous pourrons également dire qu’une augmentation de prix de 1% à ce niveau (2012 à 2013) s’est accompagnée par une diminution de la quantité offerte de 9,10% ; l’offre du ciment à ce niveau précis était donc inélastique étant donné que la valeur de son élasticité est inférieure à 1. Même chose également pour le troisième cas, c’est-à-dire 2014, où nous avons une élasticité de l’offre de -5,43%
III.2.2.2. Elasticité et pente de la courbe
En réécrivant la formule de l’élasticité de l’offre, on peut la mettre en relation avec la pente de la courbe d’offre, tout comme dans le cas de la demande.
Mais, représente la pente de la courbe d’offre (sans oublier que le prix est en ordonnée et la quantité en abscisse). D’où la formule de l’élasticité en fonction de la pente :
Comme la courbe d’offre est linéaire de la forme , alors la formule de l’élasticité est :
Plus la pente est faible, plus l’offre est élastique. Pour appliquer la formule, revenons également en 2012, 2013 et 2014, et construisons le tableau 26 suivant :
Source : Nos calculs à partir des données du tableau 26
Nous constatons de ce tableau qu’au fur et à mesure que la pente diminue, l’offre devient de plus en plus élastique allant de 0,0128 avec une variation de l’offre en fonction du prix de 78,11 tonnes à 0,0037 avec une variation de l’offre en fonction du prix de 268,31 tonnes.
III.2.3. Equilibre de la firme (Cimenterie IK)
Comme nous l’avions démontré précédemment, à l’équilibre l’entreprise produira de telle sorte que l’offre soit égale à la demande. Et partant des équations d’offre et demande trouvées pour les années 2012, 2013 et 2014, nous pouvons présenter l’équilibre pour chaque année que nous synthétisons dans le tableau 27 suivant :
Source : Nos calculs à partir des données des tableaux 24 et 26
Nous remarquons également à travers ce tableau que l’augmentation du prix de vente à la cimenterie IK s’est accompagnée d’une diminution des quantités d’équilibres sur le marché. Laquelle diminution va de 739,33 tonnes en 2012 à 431,25 tonnes en 2014. Nous constatons en outre en 2014, que le prix d’équilibre du marché auquel la cimenterie de KATANA est appelée à exercer ses activités conformément à la demande et son offre, correspond effectivement au prix de revient du ciment produit par la firme. La cimenterie peut donc produire cette quantité d’équilibre à ce prix et espérer maximiser son profit du fait que la dite quantité vendue à ce prix permet à la firme de couvrir toutes les charges liées à son processus de production et de commercialisation.
Nous pourrions alors confirmer qu’à partir de cette quantité, la cimenterie IK ne peut donc pas vendre à un prix bas par rapport à celui pratiqué par les importateurs qui s’élève à 19$, sinon elle réaliserait des pertes. Il y a donc un écart de prix de 0,77$. A moins que l’Etat lui exonère de toutes taxes ou lui subventionne, dans le cas contraire la vente au prix inférieur à celui des importateurs ne sera pas possible.
En considérant la quantité et le prix d’équilibre comme étant les prévisions à produire par la firme, nous pourrions alors calculer les écarts par rapport à la réalisation et vérifier si à ce niveau l’entreprise évolue dans la bonne voie par rapport à ses réalisations en termes de production pour le premier semestre 2014. Ainsi donc nous aurons :
Source : Nos calculs à partir des données de l’annexe
Graphiquement, nous aurons :
Source : Notre confection à partir des données du tableau 24 dans Excel
De ce tableau et graphique nous constatons que la firme évolue en perdition étant donné que les écarts sur production en termes des quantités en volume sont énormes 259,37 tonnes, ce qui aurait un impact significatif sur la compétitivité de la firme à long terme. D’où il va falloir relever sa production à 431,25 tonnes correspondant à la quantité marginale à produire.
Voyons maintenant l’impact de cette variation sur la rentabilité ou le résultat de la firme pour ce qui concerne le premier semestre 2014 :
Tableau 30 : Résultat sur vente et production du premier semestre 2014 de la cimenterie IK[5] |
|||||||||
Valeur/tonne |
Référence |
JANV. |
FÉVR. |
MARS |
AVR. |
MAI |
JUIN |
TOTAL |
|
Production |
1,00 |
431,25 |
448,40 |
155,67 |
119,08 |
635,00 |
594,76 |
375,22 |
2328,13 |
CV |
249,00 |
107381,25 |
111651,48 |
38762,28 |
29651,13 |
158115,00 |
148096,08 |
93429,18 |
579705,14 |
CF |
33,81 |
14580,56 |
14580,56 |
14580,56 |
14580,56 |
14580,56 |
14580,56 |
14580,56 |
87483,38 |
CT HT |
282,81 |
121961,81 |
126232,04 |
53342,84 |
44231,69 |
172695,56 |
162676,64 |
108009,74 |
667188,52 |
Taxes |
56,17 |
24221,62 |
25184,84 |
8743,47 |
6688,30 |
35665,45 |
33405,52 |
21074,50 |
130762,08 |
CT TTC |
338,98 |
146183,43 |
151416,88 |
62086,31 |
50919,99 |
208361,01 |
196082,16 |
129084,24 |
797950,60 |
Ventes |
1 |
431,25 |
442,94 |
116,39 |
102,71 |
351,97 |
406,21 |
361,30 |
1781,52 |
Prix |
20 |
20 |
20 |
20 |
20 |
20 |
20 |
20 |
20 |
CA Réalisé |
400 |
172500 |
177174,71 |
46556,69 |
41084,00 |
140788,00 |
162484,00 |
144520,20 |
712607,60 |
RESULTAT |
61,02 |
26316,57 |
25757,83 |
-15529,62 |
-9835,99 |
-67573,01 |
-33598,16 |
15435,97 |
-85343,00 |
Source : Nos calculs dans Excel à partir des données du tableau 12 et de l’annexe 1
De ce tableau, nous constatons que le résultat de la cimenterie IK est négatif, nous pourrions alors dire que la firme travail ou évolue à perte. Cela est plutôt dû à la baisse de la demande suite à une hausse des prix, entrainant une baisse de l’offre de la firme alors que les coûts fixes sont restés constants. Une mauvaise situation quant à la compétitivité de la firme à long terme. Il va donc falloir relever sa production à la quantité d’équilibre et ramener son prix au prix du marché pour essayer de maximiser sa rentabilité et rester compétitive dans le secteur.
[1] En réalité, l’élasticité - prix est un nombre négatif. Lorsque le prix augmente, la quantité demandée diminue. A strictement parler les valeurs de l’élasticité calculées dans le tableau sont respectivement -6,56, -9,78 et -12,78. Par convention, on se contente de représenter l’élasticité par sa valeur absolue, sachant (en tête) que ce nombre est négatif. La considération de la valeur positive facilite les comparaisons entre élasticités. Mais dans les interprétations, on ne doit pas oublier ce fait que quantité demandée et prix varient en sens inverse l’un de l’autre.
[2] Murat YILDIZOGLU, Introduction à la microéconomie, Edition libre, Marseille, 2009, p189
[3] Murat YILDIZOGLU, Introduction à la microéconomie, Edition libre, Marseille, 2009, p191
[4] Idem, p191
[5] Pour construire ce tableau, nous avons considéré la quantité d’équilibre pour l’année 2014 comme étant la quantité minimale de référence à produite et pour laquelle nous l’avons multiplié par les coûts correspondant à la production d’une tonne pour trouver les CV, CF, Taxes y relatifs. Le CF obtenu a également servi de référence sur toutes les productions réalisées.