La notion de sûreté est intimement liée à celle de crédit. Généralement, la fourniture d’une sûreté facilite l’octroi du crédit surtout pour ce qui est du crédit fourni par les banques et instituions assimilées[1].
La sûreté est susceptible de plusieurs définitions. Elle peut d’abord être définie comme tout procédé ayant uniquement pour but de prémunir le créancier de l’insolvabilité du débiteur. Les droits spécialement accordés au créancier pour que leur réalisation permette à celui-ci d’obtenir son paiement.
L’article 1 AUS donne une définition des sûretés. La sûreté y est définie comme « l’affectation au bénéfice d’un créancier d’un bien, d’un ensemble de biens ou d’un patrimoine afin de garantir l’exécution d’une obligation ou d’un ensemble d’obligations, quelle que soit la nature juridique de celles-ci et notamment qu’elles soient présentes ou futures, déterminées ou déterminables, conditionnelles ou inconditionnelles, et que leur montant soit fixe ou fluctuant ».
Il ressort de cette définition que :
La sûreté a essentiellement pour rôle de garantir la solvabilité du débiteur, en cela, elle est marquée par son caractère accessoire que l’acte uniforme rappelle en son article 2. La sûreté s’oppose à la garantie qui peut avoir une autre fonction que celle d’assurer l’exécution de l’obligation. La garantie n’a donc pas pour seule vocation d’assurer le paiement du créancier à l’échéance. Ainsi, certains mécanismes du droit des obligations comme la délégation imparfaite ou la compensation sont à cet égard, considérés comme des garanties de paiement sans être des sûretés. Il en de même de certains mécanismes comme l’assurance. La formule consacrée pour montrer les rapports entre sûreté et garantie est la suivante : toute sûreté est une garantie mais toute garantie n’est pas une sûreté.
Les sûretés sont variées et sont par conséquent susceptibles de plusieurs classifications. On distingue par exemple entre les sûretés légales, les sûretés judiciaires et les sûretés conventionnelles ou encore entre les sûretés réelles et les sûretés personnelles. L’AUS ne comporte pas une véritable classification des sûretés mais il réglemente les principales sûretés que l’on peut regrouper suivant qu’il s’agit des sûretés réelles ou des sûretés personnelles.
Selon l’article 4 al. 2 AUS, les sûretés réelles « consistent soit dans le droit du créancier de se faire payer par préférence sur le prix de réalisation d’un bien affecté à la garantie de l’obligation de son débiteur, soit dans le droit de recouvrer la libre disposition d’un bien dont il est propriétaire à titre de garantie de cette obligation ». L’AUS n’a pas consacré un titre spécifique aux sûretés réelles comme il l’a fait pour les sûretés personnelles. Pourtant, on retrouve dans le texte les dispositions consacrées à toutes les sûretés réelles aussi bien les sûretés mobilières que les sûretés immobilières. L’article 4 al.2 prévoit d’ailleurs que « sauf disposition contraire du présent Acte uniforme, les seules sûretés réelles valablement constituées sont celles qui sont régies par cet Acte ». La liste des sûretés réglementées constitue donc un numerus clausus, ce qui interdit la création de nouvelles sûretés réelles aussi bien par les législateurs nationaux que par les parties elles-mêmes sauf autorisation expresse du législateur.
Pour ce qui est des sûretés personnelles, l’article 4 al. 1 AUS définit la sûreté personnelle comme « l’engagement d’une personne de répondre de l’obligation du débiteur principal en cas de défaillance de celui-ci ou à première demande du bénéficiaire de la garantie ». Les sûretés personnelles permettent au débiteur d’offrir un second débiteur à son créancier pour garantir ses obligations autrement dit pour réduire les risques de sa défaillance. Elles aboutissent ainsi à une multiplication des personnes et donc des patrimoines qui peuvent répondre d’une même dette.
Deux principales sûretés personnelles sont réglementées en droit OHADA. Il s’agit du cautionnement et de la garantie autonome anciennement dénommée lettre de garantie.
Le droit OHADA des sûretés présente quelques particularités qu’il faut présenter avant de procéder à l’étude approfondie des différentes sûretés.
L’acte uniforme portant organisation des sûretés adopté en décembre 2010 et entré en vigueur en 2011 s’est substitué au précédent acte uniforme adopté en 1997. Ce texte comporte 228 articles répartis en six titres à savoir : Titre préliminaire : Définitions et domaine d’application des sûretés- agents de sûretés, Titre I : les sûretés personnelles, Titre II : les sûretés mobilières, Titre III : les hypothèques, Titre IV : Distribution des deniers et classement des sûretés, Titre V : dispositions transitoires et finales.
En plus de l’organisation des différentes sûretés, l’AUS comporte quelques innovations comme l’institution du débiteur professionnel et de l’agent des sûretés.
L’article 3 définit le débiteur professionnel comme « tout débiteur dont la dette est née dans l’exercice de sa profession ou se trouve en rapport direct avec l’une de ses activités professionnelles, même si celle-ci n’est pas principale ». Le débiteur professionnel sera, dans certaines circonstances, moins bien protégé que le débiteur civil ou non professionnel. Il y a aussi le régime spécifique désormais reconnu à certains créanciers, particulièrement les établissements de crédit qui peuvent par exemple être seuls bénéficiaire en qualité de créancier d’un transfert de créance à titre de garantie (articles 80 et suivants).
L’agent des sûretés est une institution véritablement nouvelle et originale dans le paysage du droit des sûretés des pays de l’OHADA bien qu’il s’inspire du droit français (article 2328-1 C. Civ.) et emprunte à la fois aux règles du contrat de commission et de la fiducie. Sans donner une définition de l’agent des sûretés, l’acte uniforme en a précisé le statut ainsi que les missions à travers les articles 5 à 11 de l’AUS.
Pour ce qui est de son statut, il ressort de l’article 5 que seuls peuvent avoir la qualité d’agent de sûreté les institutions financières ou les établissements de crédit nationaux ou étrangers. Cette fonction est donc réservée aux seules personnes morales et en particulier à celles qui relèvent du domaine bancaire et qui exercent donc parallèlement une activité de crédit ou une activité financière. L’agent de sûretés agit en son nom. Il agit au profit des créanciers qui l’ont désigné à cette fin. L’acte de désignation, qui doit être établi par écrit comme cela découle implicitement de l’article 6 doit, à peine de nullité, comporter certaines mentions telles que la détermination des obligations garanties, l’identité des créanciers et de l’agent ou encore la durée de la mission. L’agent agit dans la limite des pouvoirs qui lui sont conférés dans l’acte de désignation. Il peut se faire substituer ou être remplacé dans sa mission si ces possibilités sont prévues dans l’acte de désignation et suivant les conditions contenues dans l’acte de désignation et les modalités prévues par l’article 10. Il engage sa responsabilité dans les mêmes conditions qu’un mandataire salarié (article 11).
S’agissant de sa mission, l’agent des sûretés est désigné aux fins de constituer, inscrire, gérer ou réaliser « toute sûreté ou autre garantie de l’exécution d’une obligation ». Comme l’a relevé un auteur, « l’agent des sûretés facilite la gestion des sûretés lorsque la créance garantie est détenue par plusieurs créanciers » Autrement dit, lorsqu’un crédit est mis en place par un pool bancaire et que des sûretés sont offertes à l’appui de ce crédit, l’agent des sûretés peut être désigné pour la mise en œuvre de ces sûretés. A contrario, lorsque le crédit est mis en place par un seul créancier, il ne peut y avoir lieu à la désignation d’un agent des sûretés. L’agent des sûretés peut intervenir aussi bien en ce qui concerne la mise en place et le suivi des sûretés personnelles que pour ce qui est des sûretés réelles.
Les relations entre l’agent des sûretés et les créanciers sont clarifiées. Ainsi, aux termes de l’article 7 : « Lorsque l’agent des sûretés agit au profit des créanciers de la ou des obligations garanties, il doit en faire expressément mention et toute inscription d’une sûreté effectuée à l’occasion de sa mission doit mentionner son nom et sa qualité d’agent des sûretés. L’article 8 ajoute : « Sauf stipulation contraire et pour tout ce qui a trait aux obligations garanties, les créanciers sont représentés par l’agent des sûretés dans leurs relations avec leurs débiteurs, leurs garants, ainsi que les personnes ayant affecté ou cédé un bien en garantie de ces obligations, et les tiers. Dans la limite des pouvoirs qui lui ont été conférés par les créanciers de la ou des obligations garanties, l’agent des sûretés peut intenter toutes actions pour défendre leurs intérêts, y compris en justice, la seule indication qu’il intervient en sa qualité d’agent des sûretés étant suffisante ».
L’acte uniforme prévoit par ailleurs l’hypothèse d’un transfert de propriété de biens au profit de l’agent des sûretés, dans le cadre de l’exercice de sa mission. Dans ce cas, l’article 9 dispose que « le ou les biens transférés forment un patrimoine affecté à sa mission et doivent être tenus séparés de son patrimoine propre par l’agent des sûretés. Il en va de même des paiements reçus par l’agent des sûretés à l’occasion de l’accomplissement de sa mission ». La conséquence de l’existence de ce patrimoine d’affectation, est que « les biens ne peuvent être saisis que par les titulaires de créances nées de la conservation et de la gestion de ces biens, y compris en cas d’ouverture d’une procédure collective d’apurement du passif à l’encontre de l’agent des sûretés ».
S’agissant de son application, il faut préciser que l’AUS ne s’applique pas aux sûretés constituées antérieurement à son entrée en vigueur conformément à l’article 227 qui dispose : « Le présent Acte uniforme, qui abroge l’Acte uniforme portant organisation des sûretés du 17 avril 1997, n’est applicable qu’aux sûretés consenties ou constituées après son entrée en vigueur. Les sûretés consenties ou constituées antérieurement au présent Acte uniforme et conformément à la législation alors en vigueur restent soumises à cette législation jusqu’à leur extinction ».
Le régime des sûretés, se trouve pour l’essentiel dans l’acte uniforme relatif aux sûretés. Ce texte de base doit, sur certains points être complété par des dispositions éparses qui se trouvent dans d’autres actes uniformes soit de manière implicite soit parce que le l’AUS renvoie expressément à ces textes. Il s’agit : l’acte uniforme relatif aux procédures collectives d’apurement du passif (AUPCAP) pour ce qui est par exemple du sort des sûretés en cas d’ouverture d’une procédure contre le débiteur ou même du classement des sûretés dont le régime est modifié lorsque la distribution intervient dans le cadre d’une procédure collective, l’acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement des créances et des voies d’exécution ( AUPSRVE) principalement pour ce qui est des règles applicables à la réalisation de l’hypothèque puisque celle-ci, sauf dérogation relève des règles régissant la saisie immobilière que l’AUPSRVE organise désormais aux articles et suivants ; de l’acte uniforme relatif au droit commercial général (AUDCG) qui seul contient les dispositions relatives au registre du commerce et du crédit mobilier qui est appelé à recevoir les inscriptions de toutes les sûretés mobilières. L’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d’intérêt économique (AUSCGIE) auquel il doit être référé pour compléter le régime du nantissement des titres et droit sociaux que l’AUS énumère parmi les formes de nantissements. Les droits nationaux restent également applicables en matière de sûretés. Le législateur y renvoie expressément pour certaines questions (ex. pour la publication et l’inscription des droits réels) ou implicitement (ex. la détermination des règles de capacité). [2]
La sûreté personnelle est définie à l’article 4 AUS comme « l’engagement d’une personne de répondre de l’obligation du débiteur principal en cas de défaillance de celui-ci ou à première demande du bénéficiaire de la garantie ». L’AUS règlement deux principales sûretés personnelles : le cautionnement et la garantie autonome.
Le cautionnement est défini à l’article 13 de l’AUS comme un contrat par lequel la caution s’engage, envers le créancier qui accepte, à exécuter une obligation présente ou future contractée par le débiteur, si celui-ci n’y satisfait pas lui-même. Cet engagement peut être contracté sans ordre du débiteur. Il est désormais régi par les articles 13 à 38 de l’AUS.
Le cautionnement met en présence trois personnes que sont le débiteur, le créancier et la caution et donne donc lieu à une relation triangulaire. A la relation initiale qui lie le débiteur à son créancier, va s’ajouter une nouvelle relation entre la caution et le créancier, le premier s’engageant en faveur du second à exécuter la prestation due par le débiteur en cas de défaillance de ce dernier. Mais en même temps, le contrat de cautionnement a une certaine autonomie par rapport au contrat principal. La caution ne s’engage que sur l’initiative du débiteur avec lequel elle entretient des relations. La loi prévoit toutefois que l’engagement de la caution peut être fait sans ordre du débiteur. [3]
La dette est unique mais le cautionnement implique la présence de 2 débiteurs, cependant la caution n’est tenue qu’à titre subsidiaire. Le cautionnement ne peut exister que sur une obligation valable, la nullité de l’obligation fait disparaitre le cautionnement.
Le cautionnement ne peut non plus excéder à ce qui est dit par le débiteur ni être contracté sous des conditions plus onéreuses.
Par conséquent, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette[4].
Dans le cautionnement seul la caution s’engage envers le créancier qui accepte à payer la dette du débiteur si ce dernier ne le fait pas. Le créancier quant à lui ne prend aucun engagement. Toutefois ce principe admet quelques aménagements. Conventionnellement, le cautionnement peut devenir synallagmatique si les parties mettent des obligations à la charge du créancier. Légalement le créancier peut être tenu des certaines obligations.
Le cautionnement peut être fourni suivant diverses modalités.
Il est simple lorsque la caution ne paie la dette du débiteur principal que si et seulement si la défaillance de ce dernier est établie par le créancier et que cette caution s’engage seule à payer. Le cautionnement solidaire quant à lui recouvre diverses hypothèses : la solidarité entre la caution et le débiteur et la solidarité entre les cautions. [5]
L’article 22 nouveau de l’AUS dispose : « La caution peut garantir son engagement en consentant une sûreté réelle sur un ou plusieurs de ses biens. Elle peut également limiter son engagement à la valeur de réalisation du ou des biens sur lesquels elle a consenti une telle sûreté ». Ce texte consacre la validité du cautionnement réel qui consiste pour la caution à limiter son obligation à la valeur de certains biens précis donnés en garantie. Lorsque le bien donné en garantie est un immeuble, on parle de cautionnement hypothécaire.
Cette modalité est prévue par l’article 21 de l’AUS. Le certificateur de caution s’engage à l’égard du créancier à payer ce que doit la caution lorsque celle-ci ne paie pas. Le certificat de caution s’analyse ainsi comme le cautionnement de la caution au profit du créancier qui se prémunit par un cautionnement de second degré.
La sous-caution garantit, à la demande du débiteur, le recours que la caution aura contre celui-ci après paiement. La sous caution est une caution comme les autres à la seule différence qu’elle n’a aucune obligation envers le créancier.
Le principal effet du cautionnement est de permettre l’exercice des poursuites contre la caution (1). Mais la caution dispose de recours lorsqu’elle a payé et exceptionnellement avant d’avoir payé (2)
En cas de non-paiement de la dette par le débiteur principal, le créancier a le droit de poursuivre la caution pour se faire payer. La mise en œuvre des poursuites contre la caution (a) est subordonnée à certaines conditions (b).
Il s’agit de la défaillance du débiteur principal et de l’exigibilité de la dette.
Elle signifie que la caution ne peut être poursuivie que si la dette contractée par le débiteur principal est arrivée à terme. Malgré ce principe, l’exercice des poursuites peut entraîner des difficultés particulières en cas de déchéance du terme ou de prorogation de celui-ci.
- la déchéance du terme : Il y a déchéance du terme si la dette du débiteur principal doit être payée avant l’échéance convenue et ce, pour diverses raisons. Par rapport à la caution, l’article 23 al.4 AUS prévoit que la déchéance du terme accordée au débiteur principal ne s’étend pas automatiquement à la caution qui ne peut être requise de payer qu’à l’échéance fixée à l’époque où la caution a été fournie. Cette règle est d’ordre public.
La prorogation du terme accordée au débiteur principal par le créancier doit être notifiée par ce dernier à la caution qui, informée, peut avoir deux attitudes différentes : refuser la prorogation car elle n’est pas tenue d’accepter le bénéfice de la prorogation du terme. Dans ce cas, elle peut poursuivre le débiteur en paiement ou obtenir contre ce dernier des mesures conservatoires ou des garanties ou accepter la prorogation car contrairement à la déchéance, la caution peut bénéficier des prorogations du terme accordé au débiteur principal. Dans cette hypothèse, elle ne sera poursuivie en paiement qu’après l’écoulement du délai supplémentaire accordé au débiteur principal sauf lorsque la prorogation du terme est d’origine légale : moratoire légal, grâce accordée par le juge ou en cas d’ouverture d’une procédure collective contre le débiteur.
La caution n’est tenue de payer la dette qu’en cas de non-paiement du débiteur. C’est la conséquence du caractère accessoire et subsidiaire du contrat de cautionnement.
La défaillance prouvée du débiteur principal est un préalable à la poursuite de la caution.
Cette défaillance doit être constatée et la caution doit en être informée.
La poursuite de la caution est conditionnée par une mise en demeure adressée au débiteur et qui est restée sans effet c’est-à-dire qu’après le délai assorti, ce dernier ne s’est pas toujours exécuté.
Une fois la défaillance constatée par la mise en demeure, la caution doit en être avisée par le créancier dans le mois de la mise en demeure. Le créancier ne doit pas se contenter d’informer la caution de la défaillance, il doit en même temps indiquer le montant restant dû en principal, intérêts et accessoires à la date de l’incident de paiement. A défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus entre la date de cet incident et la date à laquelle elle en a été informée. Toute clause contraire est réputée non écrite.
Le créancier ne peut poursuivre la caution, qu’elle soit simple ou solidaire qu’en appelant en cause le débiteur principal. Lorsque la caution est poursuivie, c’est pour qu’elle paie. Elle peut donc réagir positivement en payant la dette du débiteur principal ou négativement en opposant au créancier certains moyens de défense.
La caution poursuivie est tenue de payer une somme inférieure ou égale au montant de la dette due par le débiteur en principal, intérêts et accessoires mais dans les termes de son engagement initial. L’article 30 de l’AUS impose à la caution d’aviser le débiteur ou de le mettre en cause avant de payer. La caution qui a payé sans avertir le débiteur ou le mettre en cause peut perdre son recours contre lui.
A défaut de payer, la caution peut retarder le paiement en opposant certaines exceptions au créancier.
Poursuivie en paiement par le créancier, la caution peut opposer deux moyens de défense. Il s’agit d’une part du bénéfice de discussion et d’autre part du bénéfice de division.
Le bénéfice de discussion est le droit reconnu à la caution d’amener le créancier à poursuivre d’abord le débiteur principal. C’est l’une des conséquences du caractère accessoire de l’engagement de la caution. A cet effet, l’article 27 al. 2 dispose : « la caution simple, à moins qu’elle ait expressément renoncé à ce bénéfice, peut, sur premières poursuites dirigées contre elle, exiger la discussion du débiteur principal, en indiquant les biens de ce dernier susceptibles d’être saisis immédiatement sur le territoire national et de produire des deniers suffisants pour le paiement intégral de la dette ».
Son domaine est limité car seule la caution simple et le certificateur de caution qui est toujours considéré comme une caution simple peuvent s’en prévaloir. Ce bénéfice est expressément refusé à la caution solidaire et à la caution judiciaire. Il faut noter que la caution simple peut refuser de se prévaloir de ce bénéfice par une renonciation expresse.
Le bénéficie de discussion produit des effets tant à l’égard du créancier qu’à l’égard de la caution. S’agissant du créancier, il doit supporter les conséquences de sa faute s’il s’abstient de poursuivre le débiteur alors même que les conditions de discussion sont réunies. S’il le fait avec retard ou négligence, il est jusqu’à concurrence des biens indiqués responsable à l’égard de la caution de l’insolvabilité du débiteur principal survenue par sa faute. A l’égard de la caution, l’exercice des discussions suspend les poursuites contre elle jusqu’à la fin de la procédure. Elles ne seront reprises que si la dette n’est pas intégralement payée. Mais la suspension totale des poursuites suppose que les biens indiqués soient susceptibles de couvrir la dette entière.
- Le bénéfice de division.
Il ressort de l’article 28 AUS que s’il existe plusieurs cautions pour un même débiteur et une même dette, chacune d’elle peut, sur premières poursuites dirigées contre elle demander la division de la dette. Le bénéfice de division suppose qu’il y ait plusieurs cautions pour un même débiteur. Il faut par ailleurs qu’il n’y ait pas de solidarité entre ces cautions. De même, la caution ne doit pas avoir renoncé à ce bénéfice. Le bénéfice de division est une exception péremptoire tendant à la limitation définitive des poursuites à la part contributive de la caution qui l’invoque et ce, contrairement au principe suivant lequel chaque caution doit être obligée à la totalité de la dette cautionnée. [6]
La caution dispose de recours soit contre le débiteur soit contre les autres cautions lorsqu’il en existe.
Le débiteur exerce normalement son recours contre le débiteur après le paiement mais il peut le mettre en œuvre exceptionnellement avant paiement.
La caution qui a payé est en droit de réclamer au débiteur le remboursement de ce qu’elle a payé pourvu que certaines conditions soient remplies. Celles-ci concernent essentiellement le paiement et le délai de recours. Le paiement doit avoir été effectué par la caution, en sa qualité de caution. Ce paiement doit être intégral, valable et libératoire.
Quant aux délais, la caution ne peut agir utilement que si l’action n’est pas prescrite.
Ces deux conditions remplies, la caution peut poursuivre le débiteur principal soit par la voie de l’action personnelle soit par la voie de l’action subrogatoire.
Le législateur OHADA a énuméré de manière limitative les hypothèses dans lesquelles le débiteur peut être poursuivi par la caution avant paiement. Toute caution, qu’elle soit simple ou solidaire, personnelle ou réelle doit pouvoir exercer le recours si elle se trouve dans l’un des cas prévus. Il y en a quatre :
Si plusieurs cautions appelées cofidéjusseurs ont cautionné la même dette et si l’une d’elle a acquitté la totalité de celle-ci, cette dernière bénéficie de recours contre les autres garants.
Pour que ce recours soit mis en œuvre, il faut que la caution poursuivante ait utilement acquitté la dette du débiteur. Il n’y aurait pas paiement utile si par exemple la caution a payé une dette qui n’était pas encore exigible ou si elle a payé sans en informer le débiteur qui avait déjà payé la dette. Par ailleurs, le paiement doit être effectif et libératoire pour les autres cautions poursuivies mais il peut être partiel. La caution solvens doit informer les autres cautions du paiement fait par elle au créancier. Ce n’est que sous ces conditions que son action pourra porter des fruits.
La caution poursuivante, c’est-à-dire la caution solvens bénéficie de deux recours. Un recours personnel qui lui permet d’obtenir en plus du principal, des frais et des accessoires, le paiement des dommages- intérêts et un recours subrogatoire qui lui permet d’être subrogé dans les droits du créancier et de profiter éventuellement des garanties qui lui ont été accordées par l’une des cautions. Ces recours s’exercent dans les mêmes conditions que les recours offerts au débiteur principal.
Le but de l’action est de faire supporter à chacune des cautions sa part et portion. Après déduction de sa part contributive, la caution doit diviser les poursuites. L’insolvabilité de l’une des cautions doit être supportée par toutes les cautions solvables conformément au droit commun des obligations.
Le cautionnement s’éteint pas voie accessoire ou par voie principale (1). Chaque fois que la caution aura perdu tout bénéfice de subrogation dans les droits du créancier, le cautionnement sera appelé aussi à s’éteindre (2).
Il s’agit de l’extinction de l’obligation de règlement qu’il faut distinguer de l’obligation de couverture.
L’obligation de règlement c’est l’obligation qui pèse sur la caution de payer les dettes effectivement nées entre le débiteur et le créancier autrement dit de « régler la dette garantie ». La plupart des causes classiques d’extinction de l’obligation se retrouvent dans l’extinction de l’obligation de règlement qu’il s’agisse de l’extinction par le paiement ou de l’extinction par divers autres modes. L’extinction du cautionnement par l’effet du paiement suppose que le paiement soit valable, qu’il ait été fait intégralement par la caution et qu’il ait payé en qualité de caution. En cas de contestation, il lui appartient de prouver qu’il l’a fait en cette qualité. Quant aux autres modes d’extinction, s’agit de situations dans lesquelles l’obligation est éteinte alors que le créancier n’a pas reçu la prestation attendue de la caution. Le législateur en a énuméré quelques-unes : remise de dette, compensation ou confusion. Il faut ajouter que la nullité du contrat de cautionnement a pour effet la libération rétroactive et totale de la caution.
Quant à l’obligation de couverture, son extinction marque la date à partir de laquelle les dettes du débiteur ne seront plus couvertes par la caution. Elle peut résulter du décès de la caution, de l’arrivée du terme (exprès ou implicite) ou de la résiliation du cautionnement à durée indéterminée.
L’extinction totale ou partielle de l’obligation principale éteint l’engagement de la caution dans la même mesure. Cette extinction peut intervenir d’abord par le paiement de l’obligation principale. Le paiement fait doit pouvoir libérer effectivement et intégralement le débiteur. La caution ne peut valablement opposer cette exception au créancier que si et seulement si elle prouve que le paiement a été réellement effectué. Le paiement partiel ne libère pas la caution.
Cette extinction peut intervenir ensuite par divers autres modes d’extinction accessoire. Il s’agit des situations dans lesquelles l’obligation est éteinte alors que le créancier n’a pas reçu la prestation attendue du débiteur. L’article 29 pose en quelque sorte une règle générale en disposant que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions inhérentes à la dette appartenant au débiteur principal et qui tendent à réduire, éteindre ou différer la dette. La dette du débiteur peut ainsi être éteinte en cas de remise de dette, de dation en paiement, de novation, de compensation, de confusion, de prescription ou encore de nullité ou résolution du contrat principal. Dans toutes ces hypothèses, la caution est libérée partiellement ou totalement.
Au terme de l’article 29 alinéa 2 de l’AUS, « La caution simple ou solidaire est déchargée quand la subrogation aux droits et garanties du créancier ne peut plus s’opérer en sa faveur, par le fait du créancier ». S’il arrive donc que la subrogation aux droits du créancier rencontre des obstacles, ceci aura pour conséquence de décharger la caution de son obligation. Ces obstacles peuvent être la faute du créancier ou l’impossibilité de subroger. La décharge de la caution est l’une des principales conséquences de la perte du bénéfice de subrogation qui joue donc comme une exception opposée par la caution poursuivie en paiement par le créancier. Elle profite aussi bien à la caution simple qu’à la caution solidaire et elles ne peuvent pas y renoncer dans le contrat car l’article 18 précité prévoit que toute clause contraire est réputée non écrite. Toutefois, la caution n’est déchargée qu’en proportion de la valeur des droits perdus.[7]
[1] Yvette KALIEU ELONGO, cours de droit de sûretés Ohada, Université de Dschang au Cameroun, février 2016, inédit.
[2] ISSA SAYEGH. J, commentaire de l’acte uniforme portant organisation des sûretés, in OHADA, traité et acte uniforme commenté et annoté, juriscop 4ème édition 2012
[3] Yvette Kalieu ELONGO, Op.cit.
[4] UTSHUDI, ONA, cours de droit des sûretés, UOB, inédit, 2014-2015.
[5] ANVILLE N’GORAN.JJ, du cautionnement solidaire dans l’acte uniforme portant organisation des sûretés, penant N°857
[6] UTSHUDI ONA, Op.cit.
[7] Yvette Kalieu ELONGO, Op.cit.