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Chapitre premier LE TAUX DE CHANGE : ANALYSE THEORIQUE

Partant du fait qu’il n’y a rien de plus pratique  qu’une bonne théorie, ce chapitre s’attèle à préciser  les différentes notions relatives au taux de change. De façon caricaturale nous parlons dans la première section de  la définition des concepts clés, puis ensuite nous parlerons des variétés de taux de change, du marché de change, ensuite des différents régimes de change, nous parlerons des déterminants du taux de change et enfin  nous parlerons de la politique de change.

I.1. DEFINITION

Le taux de change est le prix auxquels les monnaies s’échangent deux à deux.[1]

Le taux de change est une manifestation aux agents économiques de prix de la monnaie d'un pays exprimé par rapport à la monnaie d'un autre pays : c'est le prix qui permet d'évaluer l'évolution de la situation économique[2].

L'opération de change peut se comprendre comme un prix établi sur le marché du change : c'est le prix exprimé sous forme de relations entre deux unités monétaires d'un titre de créance sur l'étranger exigible à vue[3].

Ainsi, le taux de change est compris comme le prix qui permet d'une part l'achat et d'autre part la vente des devises entre elles. Le prix d'une monnaie étrangère dans un pays donné permet le développement aisé des échanges entre leurs populations impliquées dans le commerce international.

Sur un marché de change, interviennent plusieurs agents avec des buts différents et donc de manière dispersée. Chacun en visant ses propres intérêts choisit le mode de conversion qui lui est favorable.

Toutes ces définitions montrent clairement que la relation entre les devises n'est possible que grâce à un intermédiaire qui est le cours de change. Ces différents arguments exhibent en fait la même pensée mais sous des horizons différents.

C'est ainsi que les auteurs distinguent une variété des taux de change selon les besoins des opérations économiques à amorcer. Ceci fait l’objet de la section suivante.

I.2. Variétés des taux de change

La classification de taux de change se fait selon la nature et le besoin des intervenants sur le marché de change.

Les transactions en devises ont lieu soit au comptant soit à terme, comme pour toute autre opération commerciale[4].

En effet, la comptabilité du marché de change distingue différentes formes des taux de change :

I.2.1. Le taux de change nominal

Le taux de change nominal est considéré comme le prix relatif de deux monnaies sans tenir compte de la conjoncture. Ce taux peut être modifié par le changement dans l'offre ou la demande des monnaies même si le prix peut aussi l'affecter mais dans une faible proportion.

Nous pouvons le constater par exemple face à l'évolution en R.D.C, le prix du dollar en Franc Congolais était de 900 CDF en décembre 2011 et de 920 CDF pour les biens et services.[5]

Une appréciation de la monnaie congolaise est aussi une augmentation du prix de la monnaie congolaise en monnaie étrangère ; alors qu'une dépréciation en est une diminution. Une appréciation de la monnaie nationale correspond à une baisse du taux de change par rapport à une devise considérée. Lorsque l'on cherche à avoir le prix absolu de deux monnaies, on fait appel au taux de change réel.

I.2.2. Le taux de change réel

Le taux de change réel entre deux monnaies est une mesure synthétique de prix des biens et services d'un pays par rapport à l'autre. Les taux réels sont très importants pour quantifier les déviations vis-à-vis de la parité de pouvoir d'achat mais il permet d'analyser les conditions macroéconomiques de la demande et de l'offre dans une économie ouverte[6].

Ceci nous conduit à dire que le taux de change tel qu'observé à Goma est le prix du panier des biens, il détermine la différence de marge en terme de taux nominal et du niveau de prix.

Ceci dit, le taux de change Dollar américain-Franc congolais peut être compris comme le prix en dollar du panier des biens congolais en dollar par rapport au panier américain.

Les taux de change nominaux et réels sont les moyennes pondérées des taux d'un pays vis-à-vis du reste du monde, et en pratique vis-à-vis des principaux partenaires commerciaux. Ces deux taux sont fondamentaux dans la stabilité de la monnaie d'une nation en se rattachant à la tendance macroéconomique du pays[7].

Mais la stabilité des relations économiques sur le plan international ainsi que sur le plan national coordonnée par la banque centrale, est rendue possible avec la fixation d'une référence « le taux de change fixe ».

I.2.3. Le taux de change fixe

Le taux de change fixe est observable dans des pays où la Banque Centrale offre la monnaie à un prix fixe et achète l'or à un prix plus ou moins équivalent.

Lorsque le cours de change de la monnaie est fixé ou déterminé en termes d'or, toutes choses restant égales par ailleurs, toutes les monnaies ont un taux de change fixe les unes contre les autres. L'appréciation ou la dépréciation de la monnaie dépend dans ce cas du volume des échanges sur les marchés des biens et services[8].

La banque ne peut modifier ce taux que lorsque la quantité de la monnaie détenue par elle a sensiblement diminué et la seule voie de sortie favorable est le recours au taux flottant qui est momentané.

I.2.4. Le taux de change flottant

Le taux de change flottant permet au taux de flotter sans problème pendant un temps déterminé afin de stabiliser le niveau de négociation de la monnaie sur les marchés libres. Ce taux de change libre se détermine par le jeu des forces concurrentielles de l'offre et de la demande de monnaie. Ce type de taux de change est difficilement contrôlable par les autorités monétaires ; et pour y faire face, ils font appel au taux glissant. La détermination du type de change est une question de choix de politique monétaire d'un pays.

I.2.5. Le taux de change glissant

Le taux de change glissant permet de faire évoluer le taux de change à un rythme contrôlé, de manière automatique ou délibérée. Ce taux assure une stratégie de stabilisation pour les échanges et les payements internationaux et facilite des ajustements à long terme. Lorsque la banque a réajusté sa quantité qu'elle peut offrir et pour lui permettre de suivre le mouvement sur le marché libre, elle met en place la politique du taux flexible.

I.2.6. Le taux de change flexible

C'est un taux de change déterminé par le mécanisme né sur le marché libre sans aucune intervention. A ce niveau, chaque pays serait libre de laisser le taux de change s'ajuster à la situation économique. Ce taux rend moins intolérable les effets de l'inflation et rigide la fixation de prix des biens et services. Dans un pays où ce taux de change est d'application, l'Etat ou la banque centrale a du mal à introduire une politique pour évaluer et contrôler l'évolution de l'économie[9].

I.2.7. Le taux de change au comptant et le taux de change à terme

Le taux de change au comptant est un taux utilisé dans les transactions en devise au comptant. Les transactions en gestion prennent deux jours pour se réaliser car dans la plupart de cas, il faut deux jours pour que les ordres de payements tels que les chèques soient compensés à travers le système bancaire[10].

Lorsque la date de validation peut être de plus de deux jours, dans ce cas, le cours utilisé dans les transactions pareilles est appelé à terme. Ces deux taux ne sont pas égaux mais sont proches. Les opérateurs préfèrent s'engager dans les opérations effectuées sous un taux de change au comptant, car présentant moins de risques.

Mais cette politique fait courir le risque d'une progressive surévaluation du taux et les crises ont presque toutes été liées à un change réel trop élevé ou en appréciation constante. Cette politique n'a pas su maîtriser le risque que courent les intervenants au marché des changes[11].

Toutes les sortes de taux ci-haut mentionnées sont applicables sur le marché de change et les intervenants sur ce marché choisissent le taux qui pourra jouer à leur faveur.

I.3. Le marché des changes

Le marché des changes est la première manifestation concrète des relations internationales. Toute entreprise qui exporte et/ou importe, tout particulier qui se rend à l'étranger, tout agent économique qui prête ou emprunte en devise se heurte immédiatement à un problème de change.

Les monnaies étrangères sont échangées contre la monnaie nationale sur toutes les places financières internationales. Le marché des changes n'est pas géographiquement limité : le marché du Franc Français couvre non seulement les transactions des devises à Paris, mais également celles effectuées en Franc contre les monnaies locales à New York, à Zurich, à Londres, à Singapour, etc. Comme le souligne C.P. Kindleberg : « les marchés des changes actuels suivent le trajet du soleil autour du globe par l'intermédiaire des satellites de télécommunication »[12].

Comme n'importe quel marché, le marché des changes fonctionne selon la loi de l'offre et de la demande. Il s'agit sur ce marché de l'achat et/ou de la vente des devises contre la monnaie nationale. Pour faciliter les échanges sur ce marché, il faut fixer une unité de préférence que l'on appelle taux de change, et qui est considéré comme le prix auquel on obtient les monnaies étrangères ou les devises[13].

Vu la multiplicité des monnaies étrangères, certaines monnaies peuvent être retenues comme monnaies de référence pour servir de comparaison, il s'agit principalement du Dollar américain, de l'euro et du Deutschemark pour ne citer que les plus connues ; ces monnaies sont choisies compte tenu de degré avancé de leurs économies qui entraîne leur stabilité.

Dans le cadre de ce travail, nous nous sommes basés sur le dollar américain comme devise entrant en relation de manière directe pour la fixation de l'indice de change des biens et services échangés et consommés sur le sol congolais.

Sur un marché, un taux de change peut être exprimé de deux manières :

  • soit comme le prix d'une monnaie étrangère en termes de la monnaie nationale (par exemple 0,0019$ par CDF en décembre 2006),
  • soit comme le prix de la monnaie nationale en fonction de la devise (par exemple 605,58 CDF par dollar américain en décembre 2008). (Banque centrale du Congo).

La compréhension du marché des changes passe par la connaissance des opérateurs ou agents économiques intervenant sur ce marché.

I.3.1. Les participants au marché des changes

Le marché des changes est réservé aux institutions financières : banques, investisseurs institutionnels et les institutions financières non bancaires. Ces opérateurs interviennent pour leur compte ou celui de leur clientèle. Ils peuvent négocier entre eux ou passer par l'intermédiaire des courtiers[14].

I.3.1.1.   Les banques commerciales et d'investissement

Ce sont les importants opérateurs sur le marché des changes. Elles prennent en charge les opérations de change pour leur propre compte ou celui de leurs clients. Pour faciliter leurs opérations, les banques ont des dépôts auprès d'institutions financières étrangères qui jouent le rôle de correspondants.

Le profit des banques sur le marché des changes a deux origines : la première est commerciale et la seconde est spéculative.

  • Le profit commercial s'explique par la différence entre le cours sur le marché intermédiaire : celui auquel la banque achète des devises et celui auquel elle les vend.
  • Le profit spéculatif peut se comprendre par le fait que les banques disposent de cambistes et une compétence comparable à celle des établissements financiers.

La réduction du profit commercial s'explique par le fait que les banques sont poussées à prendre des positions spéculatives sur le marché en anticipant une variation du taux.

I.3.1.2. les banques centrales

Elles interviennent massivement, mais de manière irrégulière sur le marché des changes. En opérant sur ce marché, la banque centrale remplit trois fonctions principales :

  • La banque centrale exécute les ordres de sa clientèle : administration publique, les banques commerciales, les organismes internationaux, les banques étrangères,...
  • Elle assure sinon le contrôle, du moins la supervision du marché monétaire. Cette emprise est plus ou moins forte selon l'importance du contrôle exercé sur le marché et surtout l'importance des intervenants.
  • Elle influence la stabilité et l'évolution du cours de change, pour des raisons de politiques économiques et monétaires internes, d'une part, et d'autre part pour respecter certains engagements internationaux.

Le marché des changes interbancaires est indiscutablement le plus important et le plus liquide de tous les marchés financiers et non financiers[15].

I.3.1.3.  Les autres institutions financières

Ces institutions comprennent les filiales financières ou bancaires des groupes industriels et des entreprises commerciales.

A côté de ces filiales financières, les investisseurs institutionnels et les grandes fortunes privées sont aussi des acteurs de première importance, car les gérants de ces fonds mettent l'accent sur les placements à l'étranger pour diversifier les risques et améliorer les rendements destinés à se procurer des devises ou à couvrir un risque lié au change.

I.3.1.4.  Les investisseurs institutionnels

Ils sont les plus importants participants non bancaires du marché de change. Cet ensemble regroupe plusieurs catégories d'opérateurs : les caisses de retraite, les fonds de pension, les sociétés d'assurance, les fonds gérés pour le compte de tiers,...

I.3.1.5.   La clientèle privée

Elle n'intervient pas directement sur le marché des changes. Elle procède à des achats et à des ventes des devises en s'adressant aux banques qui ont une activité de teneur de marché ou en utilisant les services des courtiers.

La clientèle privée regroupe trois catégories d'opérateurs :

  • les opérateurs particuliers dont l'influence est tout à fait marginal, ils s'intéressent à la marge existante sur les différents marchés ;
  • les entreprises industrielles et commerciales, souvent dénommées sociétés non financières. Elles confient leur crédibilité aux intermédiaires qui agissent à leurs noms mais pour le compte de ces institutions.
  • Les institutions financières qui n'ont pas une présence permanente sur le marché monétaire ou qui ne disposent pas des fonds propres requis pour participer directement à ce marché.

I.3.1.6. Les courtiers

Ils jouent un rôle essentiel sur le marché des changes en tant qu'informateurs et en tant qu'intermédiaires sans qu'eux-mêmes ou la banque soient obligés d'acheter ou de vendre des devises, ils informent les opérateurs des cours auxquels se vendent ou s'achètent les différentes monnaies.

Ils ont un rôle d'intermédiaire dans la mesure où ils centralisent les ordres d'achat et de vente de plusieurs banques et qu'il est en conséquence, plus facile et moins coûteux pour les cambistes d'utiliser leurs services que de contacter leurs confrères susceptibles de leur acheter ou de leur vendre la devise recherchée à un prix majoré.

I.3.2. Les stratégies en présence sur le marché des changes

Diverses stratégies se confrontent sur le marché des changes qui visent toutes à gérer la position de change des opérations :

  • la stratégie d'arbitrage, qui cherche à tirer profit de différence de cours (par exemple la différence de cours à un moment donné sur différentes places financières) ;
  • La stratégie de couverture, qui vise à fermer la position de change afin de ne pas courir le risque de change ;
  • La stratégie de spéculation, qui consiste à rester en position de change ouverte en fonction des anticipations que l'on forme (par exemple, vendre à terme des devises que l'on ne possède pas si on veut anticiper une baisse du cours).

I.3.3. Les risques associés aux opérations de change

En effectuant des transactions, les opérateurs sont exposés à plusieurs risques. A côté du risque de change dont ils peuvent tirer profit ou qu'ils peuvent gérer sans réelle difficulté, les intervenants sont confrontés aux risques suivants :

  • Risque de liquidité
  • Risque de contrepartie
  • Risque de conversion
  • Risque économique
  • Risque de transactions.
  • Le risque de liquidité

Ce risque auquel est exposé un opérateur est celui de ne pas pouvoir effectuer une transaction sur le marché des changes ou de la faire mais en subissant une importante moins-value lors de l'achat ou de la vente des devises.

En fait, en temps normal, ce risque n'est guère important mais il peut arriver que le marché d'une devise disparaisse, momentanément ou définitivement, suite à une crise ou à la mise en place de contrôles administratifs affectant le marché des changes ou le marché monétaire international de la devise (euro-marché).

Ce risque ne concerne toutefois que des devises de faible importance négociées sur des marchés régionaux. Pour toutes les devises convertibles utilisées dans le commerce international ou faisant l'objet de transactions sur les marchés financiers internationaux, ce risque est très faible.

  • le risque de contrepartie

Le risque de contrepartie recouvre le risque de livraison et le risque de crédit. Le premier correspond à la faillite de la contrepartie le jour de l'échéance de la transaction. Le second correspond à la faillite de la contrepartie préalablement à l'échéance de la transaction.

Les cambistes sur le marché au comptant ne sont exposés qu'au risque de livraison. Ceux qui opèrent sur le marché à terme, sont confrontés au risque de livraison et au risque de crédit.

Le risque de livraison est évidement plus important que celui de crédit, car il entraîne la perte de la totalité de transactions. Le risque de crédit, lorsqu'il se manifeste, conduit l'opérateur à reconstituer sa position. Le cambiste est donc exposé au risque de variation du taux de changé, toujours inférieur, même si la fluctuation lui est défavorable.

  • Le risque de conversion

Il apparaît lorsqu'une entreprise détient des filiales dans les pays étrangers. En effet, chacune des filiales va établir ses résultats dans la monnaie de son pays mais par la suite il faudra les convertir dans la monnaie de la maison-mère pour établir les bilans consolidés. Quel cours de change faut-il alors retenir ?

Diverses approches sont possibles : le cours de clôture, le cours historique, l'un ou l'autre de ces cours suivant les postes du bilan.

  • Le risque économique

Ce risque est lié au futur de l'entreprise ; il est donc difficile à apprécier ou à mesurer. En effet, il s'agit de prendre en compte toutes les conséquences que pourra avoir une variation du taux de change sur une entreprise (c'est-à-dire sur ses coûts de production, sur son chiffre d'affaires,...).

La rentabilité de l'entreprise et sa compétitivité peuvent être remises en cause du fait de la variation des changes. Ce risque est parfois appelé risque de compétitivité, risque induit ou encore risque industriel.

  • Le risque de transaction

Ce risque apparaît dans :

  • Les importations et exportations libellées en devises étrangères si un délai de règlement est accordé, il y a un risque de change entre la signature du contrat commercial et le règlement car ces deux dates peuvent causer que le cours de devise à la facturation puisse fluctuer, modifiant ainsi la valeur du règlement.
  • Les emprunts et les prêts libellés en devises étrangères à court, moyen ou long terme : si l'entreprise a obtenu un emprunt, elle redoute une appréciation de la devise empruntée car cela augmenterait la valeur de ses remboursements ; en revanche, si l'entreprise a consenti un prêt elle sera pénalisée par une baisse de la devise.
  • Les investissements effectués à l'étranger, si une entreprise possède une filiale à l'étranger, il y aura des échanges entre la filiale et la maison-mère : les dividendes, redevances,... en outre, si les activités de ces deux entreprises sont liées ou complémentaires, des échanges commerciaux seront effectués. Pour toutes ces opérations le risque est présent.

Comme souligné ci-haut, on comprend alors que la notion du risque de change peut prendre plusieurs formes en se situant dans les activités commerciales, financières ou d'investissements. D'où un agent est en situation de risque de change lorsqu'il est en position de change ouverte ; dans ce cas, il peut subir une perte ou bénéficier d'un gain en raison d'une modification de taux de change. Il importe donc pour chaque agent de déterminer les éléments qui entrent en jeu lors de la modification du taux de change.

I.4.  Régime de change

Les  types  de  régimes  de  change  sont  déterminés  par  les  objectifs  que  se  fixent  les Banques Centrales sur le marché  de change. Deux cas extrêmes peuvent être distingués :

I.4.1.  Change fixe

Les  Banques  centrales  s’engagent  à  maintenir  le  cours  de  leur  monnaie  nationale  à  un niveau  fixe.  Ce  régime  peut  prendre  soit  une  forme  automatique,  soit  induire  de politiques  plus  au  moins  complexes  de  la  part  des    autorités  des  pays  concernés.

Premièrement, les Banques centrales acceptent d’échanger leur monnaie contre de l’or à un  cours  fixé  une  fois pour  toute ;  et  deuxièmement,  elles  doivent  surveiller  le  cours  de leur  monnaie  et  intervenir  sur  le  marché  si  celui-ci  atteint  certaines  limites.  Pendant  la période  où étaient en vigueur les accords de Bretton-Woods (de 1944 à 1971), toutes les Banques centrales (sauf la Réserve fédérale des Etats-Unis) devaient intervenir dès que la parité  de  sa  monnaie  s’écartait  de  plus  au  moins  1%  de  la  parité  officielle  déclarée,  par rapport au dollar des Etats-Unis, au Fonds Monétaire International.  

Par  ailleurs,  lorsqu’une  parité  ne  peut  être  « défendue »,  les  accords  internationaux  prévoient  la  possibilité  d’une  dévaluation  (ou  réévaluation)  du  cours  officiel.  La dévaluation  reste  le  seul  moyen  à  la  disposition  d’un pays  pour  corriger  un  déséquilibre structurel  de  sa  balance  de  paiements.  Si  le  déséquilibre  n’est  que  temporaire (déséquilibre  conjoncturel),  les  pays  peuvent  demander  à  bénéficier  des  crédits extérieurs.  Ces  mécanismes  de  crédits  sont  gérés  par le  FMI  qui  peut  même  exiger  des mesures de politique économique internes contraignantes  pour un pays qui sollicite une aide importante (exemples des certains PED endettés).

Vers la fin des années 60, les marchés des changes ont connu d’importants mouvements de fluctuation du dollar que les Banques centrales n’arrivèrent plus à arrêter, si bien que les  Etats-Unis  durent  mettre  fin  à  la  convertibilité  du  dollar  en  or  le  15  août  1971.Les accords  de  Washington  de  décembre  71  prévoient  alors  une  dévaluation  du  dollar  et  un élargissement  des  marges  de  fluctuation  des  monnaies  (2,25%  au  lieu  de  1%  de  chaque côté  de  la  parité  officielle).En  1973,  les  banques  centrales  européennes  refusent  de continuer à soutenir le dollar et renoncent désormais à être rattachées au dollar.

Et tous ces changements ont entraîné la fin du système de changes fixes organisé autour de  l’étalon-or  et  l’avènement  du  flottement  généralisé  des  monnaies.  Les  accords  de Bretton-Woods  ont  permis  d’organiser  financièrement  le  monde,  mais  avec  l’évolution des  mouvements  financiers,  l’équilibre  du  change  fixe  n’avait  plus  sa  place.  C’est  ainsi qu’est apparu le système de change flottant où le taux de change varie librement sur le marché  de  changes  au  gré  des  offres  et  des  demandes  de  cette  monnaie.  Ceci  est officialisé avec les accords de la Jamaïque de 1976.

I.4.2.  Change flottant, glissant (ou flexible)

La Banque centrale qui impose ce régime à sa monnaie nationale n’intervient jamais sur le marché  des  changes.  Depuis  l’adoption  en  1973  du  système  des  « taux  de  change flottants »,  la  variabilité  des  taux  a  posé  une  série  de  problèmes  qui  ont  stimulé  la réflexion théorique. 

Dans  son  principe,  le  système  des  taux  flottants  suppose  que  le  cours  international  de chaque monnaie fluctue librement en fonction des variations de l’offre et de la demande qui s’exerce sur le marché. La détention d’un stock d’or et de devises est alors en théorie inutile.

 L’objectif premier est d’assurer le rééquilibrage automatique de la balance de paiements : un  déficit  de  la  balance  de  paiements  signifie  que  l’offre  de  monnaie  nationale  est supérieure  à  sa  demande  sur  les  marchés  des  changes ; cet  excès  d’offre  provoque  une dépréciation  de  la  monnaie  nationale ;  à  son  tour,  cette  dépréciation  stimule  les exportations  (devenues  moins  coûteuses  pour  les  non-résidents)  et  freine  les importations  (devenues  plus  onéreuses  pour  les  résidents).  Cela  contribue  ainsi  au rétablissement de l’équilibre compromis.  Un autre avantage attribué au système est de supprimer  le  problème  des  réserves  de  devises  puisque les  Banques  centrales  ne devraient théoriquement plus intervenir pour maintenir le cours de leur monnaie. 

Dans le but de maintenir la parité de leurs monnaies entre certaines limites, l’intervention sur le marché des changes n’est pas le seul instrument de politique économique que les autorités  utilisent ;  elles  mettent  aussi  en  général  en  œuvre  des  politiques  monétaires et/ou budgétaires et fiscales[16].

Remarquons  ici  que,  même  pendant    des  périodes  où  aucun  accord  international  ne  les obligeait  à  stabiliser  la  parité  de  leurs  monnaies, de  nombreuses  Banques  centrales  ont tout  de  même  pratiqué  l’intervention  sur  le  marché  des  changes.  Leur  motivation  est alors  le  maintien  d’une  certaine  parité  qui  leur parait  nécessaire  pour  le  développement de  leur  économie.  Ces  interventions  contrarient  le  libre  jeu  des  changes  fluctuants  et placent  le  système  monétaire  international (SMI)  dans  un  régime  souvent  qualifié  des changes administrés.

Tableau 1.  Avantages et inconvénient par type de régime de change

CHANGE FLOTTANT

Avantages

Inconvénients

Permet un ajustement automatique de la balance des paiements

Autonomise la politique  monétaire

Rend stabilisatrice la spéculation

Ne rééquilibre pas les échanges extérieurs à cause de la non-coordination des politiques et de l’insuffisance possible des élasticités prix des exportations et des importations

Accentue l’inflation mondiale à  cause du relâchement possible des politiques  monétaires

Favorise la volatilité  des taux de change, d’où accroissement de l’incertitude avec toutes ses conséquences

CHANGE FIXE

Impose des bénéfiques disciplines en matière monétaire et budgétaire. La contrainte externe qu’il impose pousse à  une  politique anti-inflationniste, ce qui est favorable à la compétitivité-prix

Stimule les échanges internationaux grâce à la stabilité du système qui limite l’incertitude

Favorise la coordination internationale et  limite le « chacun pour soi »

Perte de l’autonomie de  la politique monétaire qui doit être nécessairement dédiée à l’équilibre externe

Encouragement de la spéculation qui devient déstabilisatrice. Avec le risque de devoir dévaluer, et donc celui d’une surenchère aux dévaluations compétitives

 Difficulté de faire face à un choc asymétrique puisque l’ajustement par le change est à priori impossible.

Source : Christian BIALES (2011), le taux de change

L’expérience  révèle  qu’entre  ces  deux  cas  extrêmes  de  flottement  pur  et  de  fixité absolue,    il  existe  toute  une  gamme  de  régimes  reposant  sur  des  arrangements internationaux différents. Le fonctionnement d’un régime de change dépend de la nature du  SMI  dans  lequel  celui-ci  s’inscrit.  La  notion  du  « système »  renvoie  aux  idées  de régulation et d’organisation. 

Dans la pratique, un système monétaire fonctionne à partir d’un ensemble d’institutions, de  règles  et  d’accords  destinés  à  organiser  des  opérations  monétaires  entre  pays.

Dominique  PLIHON[17]  énumère  trois  critères  permettant de  classer  les  SMI  et  les  régimes qui leur sont associés :

  • Le degré de rigueur de la règle de change (des changes flottants purs aux changes rigoureusement fixes) ;
  • Le degré de mobilité de capitaux (de la mobilité nulle à la mobilité parfaite) ; et
  • Le degré  de  sensibilité  des  objectifs  de  la  politique monétaire  aux  contraintes extérieures (des politiques autonomes aux politiques communes).

 La  combinaison  de  ces  critères  qui  ne  sont  pas  indépendants  peut  être  représentée  par un  triangle  dit  de  Mundell.  Ce  triangle  illustre  un  enseignement  incontournable  de  la théorie  monétaire  internationale,  qui  est  le  théorème  d’impossibilité  suivant : il  est impossible  de  combiner  des  changes  fixes,  la  mobilité  des  capitaux  et  des  politiques monétaires indépendantes.

[1] Henry GERENDAWELE, Cours d’économie monétaire générale, G3 FASEG ULPGL-Goma, 2011-2012

[2]MONDHER C. ,Les taux de change, éd. 18, Une Fayette 75009, Paris, 2004.

[3]SIMON Yves:Marché des changes et gestions du risque de change, éd. Dalloz, paris,  1995.

[4]BEITONE A. et al:Dictionnaire des sciences économiques, Armand colin, Paris, 2001

[5] Banque Centrale du Congo, Rapport annuel, 2012

[6]MONDHER Chérif, op.cit.

[7]BURDA Michael et alii : Macroéconomie, une perspective européenne, De Boeck, Paris,

1993.

[8]MEUNIER Nicolas et alii : Economie du risque pays, éd. La découverte, Paris, 2005.

[9] BEITON A., Op.cit.

[10]TIETMEYER Hans: Economie sociale de marché et stabilité monétaire, Economica, Paris, 1999, p89

[11]MEUNIER N., Op.cit.

[12]SIMON Y., Marché des changes et gestions du risque de change, éd. Dalloz, paris, 1995, p84

[13]BURDA Michael et alii. Macroéconomie, une perspective européenne, De Boeck, Paris,

1993, p45

[14] Yves SIMON, op.cit., p54

[15] Idem

[16] Aftalion F. et Losq E. (1995) , Les taux de change, Coll. Que sais-je, PUF, Paris.

[17] Dominique  Plihon (1999), Les  taux  de  change  « d’accès  facile,  clair  et  précis,  illustré d’exemples et anecdotes », coll. Repère, éd. Le monde, Paris.

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