Chapitre I. LES ENGRAIS PHOSHATES
I.1. Notion de fertilisation
I.1.1. Fertilité et fertilisation
La fertilité d’un sol est sa capacité à produire des fruits c’est-à-dire à fournir des récoltes ayant un rendement élevé et de bonne qualité. La fertilisation d’un sol par contre est un ensemble de pratiques culturales coordonnées ayant pour objectif d’assurer aux plantes cultivées une alimentation correcte dans l’ensemble des éléments nutritifs, par l’apport de matières fertilisantes (engrais et amendements) (Elisse et Lambert, 1995).
I.1.2. Fertilisation phosphatée
La fertilisation phosphatée a pour objectif de satisfaire les besoins en phosphore de la plante selon les objectifs de rendement et de qualité, et donc de compléter l'offre du sol en maintenant son potentiel de production. Une alimentation convenable en phosphore permet un développement harmonieux des plantes. Tout le phosphore n’est pas disponible pour la plante, seule une fraction infime est sous forme assimilable capable de participer à l’alimentation du végétal et au maintien de la concentration de la solution du sol. Le phosphore biodisponible est surtout présent sous forme d’ions orthophosphates en solution qui sont directement assimilables par les plantes (UNIFA, 2005).
I.2. Fonctions du phosphore
Le rôle du phosphore est important dans les fonctions métaboliques de la plante. Il fait partie des éléments essentiels nécessaires pour la croissance et le développement des végétaux, cela du fait qu’il participe au système de transport d’énergie dans les cellules étant donné qu’il entre dans la composition des adénosines triphosphates (ATP), L’ATP fournit toute l'énergie du métabolisme nécessaire pour toutes les réactions de synthèse. Au point de vue métabolique, le phosphore catalyse la synthèse des glucides à partir de CO2 et de H2O et il fait aussi partie du complexe ADN-ARN, ces derniers étant responsables de la synthèse des protéines, hydrates de carbone, d’acides nucléiques et autres réactions exigeant de l'énergie tel que l’absorption des éléments nutritifs à travers les racines (Andry, 2011).
Il a également été montré que le phosphore améliore la réponse de plusieurs cultures à la fertilisation azotée. Ceci explique la forme chétive des plantes carencées en
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phosphore par une réduction de la croissance générale. Ces fonctions essentielles au niveau moléculaire se traduisent par divers effets à l’échelle de la plante (Valé, 2005) : favorise le développement de la feuille, la vigueur, la floraison, la nouaison, la précocité, le grossissement des fruits, la formation et maturation des graines et le développement du système racinaire et par la suite, de la production culturale (Andry, 2011). Le Phosphore est donc un élément essentiel pourvoyeur dans l’augmentation de rendement (HENINTSOA, 2013). De plus, c’est un facteur de qualité par l’augmentation des teneurs en phosphore des aliments qui détermine en partie leur intérêt pour l’alimentation animale et pour l’homme (Elisse et Lambert, 1995).
Il joue un rôle clé dans le processus de fixation d'azote puisqu'il aide à créer et déplacer l'énergie grandement nécessaire dans le processus de fixation d'azote, augmente la population de rhizobium dans la zone des racines, améliore la croissance des racines et de la pousse, ce qui augmente l'habileté de la plante de fixer de l'azote. Plus de racines signifie plus de sites de formation de nodules, réduit le temps requis par les nodules pour commencer le processus de fixation, augmente le nombre et la grosseur des nodules, augmente la quantité d'azote dans la substance du plant (ECDN, 2012).
I.3. Biodisponibilité du phosphore
La biodisponibilité d‘un élément fait référence à la fraction potentiellement utilisable pour les organismes notamment les plantes dans un système cultivé (Andry, 2011). Environ 80 % des sols tropicaux ne disposent guère de quantités de phosphore suffisantes pour une nutrition satisfaisante des plantes (Reca, 2012). De ce fait, il constitue généralement le facteur limitant pour la croissance des plantes dans les Ferralsols (Andry, 2011).
Malgré qu’on peut apporter du phosphore au sol, mais sa disponibilité cause encore un grand problème. Jusqu'à 90 % du fertilisant phosphaté (P) utilisé ne sert pas durant la saison d'application puisqu'il est adsorbé (emprisonné) dans le sol par d'autres éléments, le rendant indisponible pour la récolte (ECDN, 2012). Comme les sesquioxydes métalliques sont complexés autour des feuillets d‘argile et sont chargés positivement, les ions « phosphates » chargés négativement vont être fixés autour de ces pôles d‘aluminium et de fer. Le P est, parmi les éléments principaux, peu mobile et le moins disponible pour les plantes (Andry, 2011). Une partie du phosphate emprisonné sera éventuellement transformé en formes utilisables mais ceci ne se produit pas assez rapidement pour satisfaire aux demandes
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de cultures à haut rendement ; et au moins 25 % ne sera jamais disponible, ce qui rend primordial d'obtenir l'utilisation la plus efficace du fertilisant phosphate (ECDN, 2012).
Donc, parmi les facteurs limitant, d’ordre chimique, la carence en phosphore (P) est l’une des plus graves et des plus fréquentes entraves à l’intensification des productions agricoles dans des zones où la perméabilité du sol est originellement élevée (sols sableux). Dans la sous-région des grands lacs, il est attesté que la déficience ou même la carence en phosphore des sols est une contrainte majeure pour la production agricole. Ainsi la fertilisation est un outil précieux d’augmentation de la fertilité des sols tropicaux (Reca, 2012).
Seul le phosphore du complexe argilo-humique est rapidement disponible aux plantes, pour cette raison, afin de favoriser l’absorption du P, la plante libère dans la rhizosphère des phosphatases qui hydrolysent le phosphore le libère sous forme d’ions orthophosphates, sous cette forme les racines peuvent l’absorber. Les mycorhizes jouent un rôle fondamental dans l’absorption du phosphore par la plante. Ces derniers en secrétant des enzymes sont capables d’absorber un phosphore fixé par le sol (forme non assimilable par la plante directement) pour le transformer ensuite en forme assimilable à la plante en contrepartie de sucres provenant de la photosynthèse (symbiose racinaire), Mais cela ne se produit pas rapidement pour satisfaire aux besoins des plantes (IFDC CATALIST, 2010).
I.4. Solubilité et assimilabilité des engrais phosphates
Le fait que le P est peu mobile dans le sol c’est-à-dire qu’il libère difficilement des nutriments, selon Andry, en 2011, qui montre que les ions « phosphate » (H2PO4- et HPO42-) dans la solution du sol sont conditionnés par le pH.
Dans les sols très acides (pH inférieur à 5,5) et à pH supérieur à 7 avec une capacité élevée de rétention de P, l’incorporation du P juste 4 à 8 semaines avant le semis est recommandée afin de réduire au minimum la transformation de phosphore dissous en formes indisponibles pour les plantes. Les expérimentations de laboratoire ont prouvé que cela peut prendre 4 à 8 semaines pour que le P atteigne la solubilité maximum. Cependant, dans les sols moins acides (pH aux environs de 5,5 - 7) avec une faible capacité de rétention du P, l’incorporation du P quelques semaines avant le semis est préférable. Ceci laisse le temps pour une solubilisation du P et sa mise à la disposition des plantes (Barnes et Kamprath, cités par FAO, 2004).
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Les résultats d’une étude mené à Kalehe sur le phosphore, ont montré que l’utilisation du P au jour de semis à une dose identique de 60Kg/ha soit respectivement 802.13 Kg/ha, 294.44 Kg/ha et 294.44 Kg/ha de NPK (17% de P2O5), de TSP (45% de P2O5) et DAP (46% de P2O5) n’a pas influencé les paramètres végétatifs du haricot. Quant aux paramètres de rendement, les différents traitements ont eu des effets similaires en ce qui concerne le poids de 100 graines, nombre de gousse par plante et le rendement à l’hectare (Mwatsi, 2015). Par contre, les résultats d’une étude menée à Kiringye dans la plaine de la Zuzizi sur les différentes périodes d’application des sources de phosphore (DAP, TSP et NPK), ont montré que l’utilisation du P à une dose de 60Kg/ha a permis une augmentation de rendement lorsqu’il était appliqué à deux et à une semaines avant semis par rapport à l’application au jour de semis (Kabakaba, 2014).
Le phosphore des engrais nécessite du temps pour se fixer aux particules de sol et ainsi libérer des éléments nutritifs essentiels à la croissance des cultures (CRAAQ, 2008).