Arrow Table de matières
8263791

INTRODUCTION

  1. Choix et intérêt du sujet

            Le travail que nous nous proposons d’accomplir porte sur l’interculturalité dans Enfer mon ciel et Et voici le sorcier de Sébastien Muyengo M. Il s’inscrit dans le cadre de la recherche littéraire que la théorie de la littérature appelle « perspective du lecteur » que nous retrouvons dans la triade « auteur-texte-lecteur », « théorie de la réception et de la lecture », « approche du lecteur » ou encore « le tiers état lecteur/public » (Makomo Makita J. 2011 : 4). Il veut donc étudier les mécanismes de l’écriture qui participe à la propagation des réalités culturelles, tenant compte des valeurs et des antivaleurs véhiculées par celle-ci.

      Nous avons jeté un regard particulier l’interculturalité de Sébastien Muyengo dans ces œuvres parce qu’au-delà d’un exercice de type scolaire et de toute production récente dont la littérature demeure sujette à caution, ces œuvres romanesque de Sébastien Muyengo paraissent thématiquement engagées et riches en artifices langagiers.

      Il se remarque cependant que les travaux réalisés dans le cadre de cette littérature congolaise francophone sont moins nombreux, si pas insuffisants. Cela s’explique par la rareté des documents critiques sur les œuvres des auteurs congolais, c’est-à-dire que les études qui leur sont consacrées sont moins diversifiées ou simplement que la littérature congolaise est encore trop jeune et évolue à pas de tortue. C’est dans ce sens que nous avons jugé orienter notre recherche vers la découverte des indices interculturels dans deux productions littéraires de notre terroir pour la promotion de leur auteur en particulier et de la littérature congolaise en général. 

      Notre choix est d’abord motivé par l’attention particulière portée sur littérature congolaise parce qu’elle concourt à la quête de notre identité, mais aussi parce qu’elle est nôtre. Ensuite sur Sébastien Muyengo et ces productions littéraires (Enfer mon ciel et Et voici le sorcier), suite à leur brouillage des différentes réalités culturelles. Il s’agit des œuvres opaques qui nous interpellent de recourir les lunettes scientifiques dans la lecture et l’analyse à travers une irradiation réelle et/ou générale. Sous cette perspective, l’écriture relate la réalité de manière spécifique à travers un certain effort de capter les états psychologiques de la société.

      Une telle étude présente pour nous un intérêt tout particulier sur le plan littéraire, esthétique, et social, car elle permet de découvrir comment les données relevant des réalités sociales peuvent servir pour la confection d’un travail littéraire de grande envergure. De ce fait, l’analyse de ces deux œuvres d’un même auteur, conduit à vérifier si sa façon d’écrire est liée à l’espace culturel dans lequel il évolue fin d’observer sa part dans la prise en compte de l’imaginaire social qui fonde ce grand édifice littéraire. C’est cette étude qui justifiera notre implication et participation de façon plus ou moins ouverte à la détermination générique et à la signification de ces œuvres comme le soutient Jauss H. R. dans Pour une esthétique de la réception :

La vie de l’œuvre littéraire dans l’histoire est inconcevable sans la participation active de ceux auxquels elle est destinée. C’est leur intervention qui fait entrer l’œuvre dans la continuité mouvante de l’expérience littéraire, où l’horizon ne cesse de changer, où s’opère en permanence le passage de la réception passive à la réception active(…) de la norme esthétique admise à son dépassement par une production nouvelle. (1978 : 49).  Ces interrogations laissent entendre clairement le bien-fondé de ce travail.

  1. Problématique

      A la lecture des œuvres qui constituent notre corpus, nous avons remarqué que les structures éclatées, fragmentées, disparates, ses formes non conformes aux conventions littéraires réalistes de la fiction, le contenu de son contre-discours social nous ont permis de revisiter un monde gênant, une société en crise, mais non moins incontournable dans notre quotidien africain (réalités culturelles). En ce sens, la question qui nous vient en tête est celle de savoir les mécanismes utilisés par l’auteur et fonctionnements des réalités culturelles dans ces écrits. De ces questions principales découlent d’autres qui les sous-entendent et les spécifient :

  • Ces deux œuvres de Sébastien Muyengo s’influencent-elles ? A partir de quels éléments culturels et/ou littéraires ?, c’est-à-dire, convergences et divergences.
  • Les univers singuliers ou les particularités de l’auteur ont-ils pris part dans la description des réalités culturelles ?
  • Comment l’auteur procède-t-il dans le brouillage des réalités culturelles ? Que vise-t-il par ce brouillage ?
  • Les réalités culturelles auxquelles recourt l’auteur constituent-elles un frein pour le développement de la société qui les véhicule ?
  1. Hypothèses

      Au regard de ce questionnement formulé en terme de problème, les réponses suivantes méritent d’être vérifiées, soumises à l’épreuve afin d’en porter un jugement (affirmer ou infirmer) :

  • A la lecture de ces textes, ces œuvres sembleraient s’influenceraient à partir du choix de certaines réalités culturelles, des emprunts, des insertions, des idiomes et du milieu de vie de ses personnages implicitement exprimé, mais que l’on découvre à partir des réalités de son peuple en réalité.

Bien plus, ces œuvres appartenant à un seul et même auteur, ne peuvent pas ne pas s’influencer parce que dit-on : la parenté entre les œuvres d’un même auteur  par-delà le genre, est tellement reçue comme évidente qu’une certaine opinion estime qu’un écrivain n’écrit qu’une seule œuvre, entendant par-là que toutes ses productions qui suivent la première constituent le cas de réécriture.

  • L’auteur décrirait les réalités qui lui sont propres, vécues dans sa société de vie quotidienne, de son pays et pourquoi pas de toute l’Afrique en général ?
  • Dans le bouillage des réalités culturelles, l’auteur opposerait les réalités d’ordre différent (antivaleurs-valeur), afin de tracer les voies de sortie en termes de leçons morales (règles de bonne conduite). Sa visée dans ce brouillage est que le peuple prenne conscience de ses actes (réalités) et se dote des principes nouveaux (changement de mentalité) pour la reconstitution d’un monde nouveau.
  • Les réalités (croyance à sorcellerie, rêve, mythe de l’ailleurs et de la personne, exode rural, etc.) entraveraient le développement de la société parce qu’elles sont à la base des conflits. Mais aussi, une société abandonnée à son triste sort (exode) ne peut avoir aucune perspective de développer, car le développement de toute société émane de son peuple.
  1. Objectif du travail

      Les objectifs de cette recherche son sont multiples et variés. Nous voulons dans un premier temps, éveiller l’intérêt des scientifiques, chercheurs et particulièrement les littéraires en suscitant leur curiosité sur le phénomène interculturel un des sujets d’actualité sous d’autres cieux, sur les productions nationales qui constituent un des fonds du patrimoine culturels du pays. Dans un second temps, nous voulons amener le peuple congolais en particulier et africain en général à s’enraciner dans son univers culturel à la lecture de ses réalités et s’ouvrir au monde par le biais de la littérature en général et ce présent travail en particulier.

      En effet, nous pensons que la littérature est un moyen efficace pour transmettre le phénomène de l’interculturalité à l’homme en ce sens que les savoirs sont renfermés dans les livres selon ce que nous lisons dans la Charte coloniale de notre pays à son article 11.

      En bref, nous voulons déceler, analyser, exploiter l’écriture, l’expressivité de l’interculturel dans ce deux œuvres de Sébastien Muyengo. C’est dans ce sens que nous voulons hisser Sébastien Muyengo au rang des écrivains congolais au même titre que les autres, voire même africains de la francophonie.

  1. Méthodes de recherche

      Tout étude scientifique rigoureuse suppose inévitablement le recours aux méthodes de recherche qui constituent le piédestal, le pilier, l’épine dorsale de sa scientificité-même. Cela étant, notre étude ne s’écarte pas de la norme. Elle s’appuiera sur des méthodes scientifiques pouvant nous permettre de mieux saisir la portée du phénomène de l’interculturalité dans ces œuvres qui constituent notre corpus. Faisant référence au propos de P. Brunel (1989 : 29), nous recourons aux méthodes suivantes :

  1. La méthode comparative

      La méthode comparative nous permet de confronter les deux textes en étude afin de dégager leurs ressemblances, leurs dissemblances à partir des traces interculturelles. Elle nous permet également, à partir des lois édictées par P. Brunel en cet effet, de cerner les mots appartenant à la langue A (étrangers) qui affichent et investissent dans le texte écrit en langue B une « légalité » qui jouit de la dominance au même titre que le texte. Mais aussi l’insertion de la réalité culturelle A dans le texte parlant de la réalité B. Dans cette perspective, le comparatisme reçoit un renfort de l’intertextualité et de l’intertextualité qui se veulent des approches filles de celle-ci. 

  1. La méthode sociocritique

      Etant donné que la sociocritique, selon C. Duchet (1971 : 4-9), permet d’étudier l’univers présent dans le texte, le discours social, le mode de pensée, les phénomènes de mentalités collectives, les stéréotypes et les présupposés qui s’investissent dans l’œuvre littéraire, c’est-à-dire en d’autres termes l’idéologie dans le rapport imaginaire des individus à leurs conditions réelles d’existence.

  1. La méthode stylistique

      En raison de son habileté de crypter les ressources langagières d’une œuvre, la stylistique nous permet, en nous attachant plus à la stylistique énoncée par Congard (2001 : 18) et Charles Bally (1909 : 16), de relever et analyser les faits de la sensibilité par le langage, l’expressivité du texte.

  1. Etat de la question

      Pour poser le problème à examiner et à analyser dans cette recherche, il nous semble primordial si pas impérieux, de le situer par rapport aux études antérieures consacrées à cette thématique, à l’auteur et à ces œuvres sous examen, mais aussi aux approches littéraires de notre investigation. C’est pourquoi nous devons reconnaitre d’emblée que nous ne sommes pas pionnier en cette matière et qu’il existe déjà des travaux effectués à l’ISP/BKV par d’autres chercheurs, mais ne traitant pas la même thématique, non plus le même corpus et la même méthode littéraire.

      Les titres ci-dessous sélectionnés pendant notre exploration, en constituent un témoignage au sujet de l’auteur, son œuvre et les approches du travail :

  • MATESO Dunia : « Du réalisme à la poétique romanesque dans Enfer mon ciel de Sébastien M. et Cité 15 de Charles D.S.K. », ISP/BKV, Mémoire inédit, 2007-2008 ;
  • KANINGINI K.D. : « Traces de l’interlinguistique et de l’interculturel dans les œuvres de quelques écrivains lega. Propositions didactiques pour l’enseignement de ces œuvres », ISP/BKV, Mémoire de DEA, 2013-2014 ;
  • BADERHA B.E. : « Enfer mon ciel de Sébastien M. et Au taux du jour de Charles D.S.K. : pour une étude intertextuel », Mémoire inédit, ISP/BKV, 2015-2015 ;
  • Aimé BISHIKWABO M. : « l’écriture du chaos dans Enfer mon ciel de Sébastien Muyengo M. », TFC inédit, ISP/BKV, 2015-2016.
  1. Subdivision du travail

            Notre travail s’articule sur trois grands chapitres, hormis l’introduction générale qui brosse succinctement les grandes articulations en termes des résultats auxquels cette démarche aboutira pour nous rendre compte de ces œuvres de Sébastien M.

            En effet, le premier chapitre s’intitule « Cadre théorique et méthodologique ». Dans ce chapitre, nous nous proposons de circonscrire les définitions des concepts clés de notre sujet et de quelques concepts des titres du corpus qui présentent des caractères énigmatiques qui entraveraient leur compréhension. Ensuite, nous focalisons notre attention sur l’analyse des outils méthodologiques suivie d’un résumé indispensable à l’interculturalité et d’autres concepts connexes qui y réfèrent. Enfin, nous présentons l’auteur et notre corpus, suivis des contenus sémantiques globaux.

Le deuxième chapitre qui a pour titre « les traces de l’interculturalité dans Enfer mon ciel et Et voici le sorcier », analyse les emprunts, les insertions, les idiomes et autres élément connexes à ceux-ci.

Enfin, le troisième chapitre portant sur « les stratégies scripturales et énonciation stylistique dans Enfer mon ciel et Et voici le sorcier » analyse l’usage de la langue pour exprimer l’interculturel. Il s’agit donc ici d’analyser l’écriture au niveau lexical, syntaxique et stylistique (figure de style). 

Partager ce travail sur :