Dans ce chapitre, nous sommes obligé de d’éclairer certains termes qui réapparaissent toujours au fil de ce travail selon le sens dans lequel nous le prenons. Les principaux concepts utilisés dans ce travail sont :
Un événement indésirable susceptible de se produire[1]
Le changement climatique global se traduit localement par plusieurs évolutions qui modifient les conditions de production. Il s’agit de décalages dans les calendriers climatiques (retard dans l’arrivée des pluies notamment) ; de changements dans les hauteurs d’eau reçues annuellement, avec, dans de nombreuses régions, des périodes de sécheresse plus marquées et ou plus fréquentes ; de la fréquence accrue des phénomènes paroxystiques et des évènements anormaux cyclones, gelées, températures anormalement élevées; enfin, et partout, d’une très forte variabilité temporelle et spatiale au niveau local.
L’insécurité alimentaire qui existe lorsque les êtres humains n’ont pas à tout moment un accès physique et économique à une nourriture suffisante nutritive permettant de satisfaire leur besoins énergétiques d’une vie saine et active.
Dans aucune région du monde et à aucun moment, le climat n’a jamais été complètement prévisible. Il y a toujours eu une dimension aléatoire, plus ou moins marquée selon les régions. Historiquement, les sociétés rurales ont dû prendre en compte les risques naturels qui prévalaient dans leur territoire. Les mécanismes mis en jeu, au plan individuel ou collectif, sont basés sur :
- L’auto-assurance :
- stockage de vivres d’une année sur l’autre pour se préparer à une mauvaise récolte au niveau individuel, familial ou de la collectivité.
Pour des raisons pratiques, les denrées stockées sont le plus souvent des céréales sèches, mais il peut s’agir également de produits transformés (flocons de pomme de terre). La culture de certains tubercules dont la récolte peut être différée, comme le manioc, peut être considérée comme du stockage sur pied. Constitution d’un capital susceptible d’être monnayé pour acheter des vivres en cas de besoin. Ce capital est constitué le plus souvent de petit ou gros bétail.
La répartition des risques : mise en valeur d’espaces diversifiés : différents types de sols, niveaux du top séquence (bas-fonds/plateaux), étages altitudinaux, zones agro-climatiques ou écologiques exploitées par les troupeaux des éleveurs nomades ou transhumants; production d’espèces ayant des besoins différents - notamment dans les associations de cultures - ou complémentaires.[3]
Nous nous intéressons ici non seulement aux données objectives sur l’évolution du climat, mais aussi aux changements ressentis par les agriculteurs eux-mêmes. Le « changement climatique » se traduit à la fois par une évolution tendancielle de long terme, par l’augmentation des phénomènes extrêmes et par une plus grande variabilité du climat. Dans la zone de San Dionisio au Nicaragua, les producteurs enregistrent à la fois un démarrage tardif, mais surtout un arrêt précoce des pluies qui les oblige à adapter leur calendrier cultural : « l’hivernage tend à se terminer dès la fin octobre, il n’y a presque plus de pluie en novembre ; alors, nous avons avancé la date de semis du second cycle de culture : en 2ème culture on sème les haricots en août car il n’y a plus de pluie en novembre[4] ».
Les phénomènes et mécanismes évoqués ci-dessus ont plusieurs catégories de conséquences, directes et indirectes sur les exploitations et les familles agricoles. Nous énumérons ici les principales.
- Conséquences directes des aléas climatiques
- les effets directs sur les personnes : il s’agit d’abord des morts ou blessures accidentelles résultant des intempéries. Il faut citer également les maladies qui se développent à la faveur de l’évolution du climat ou qui frappent les populations migrantes n’ayant pas développé de résistance, ne maîtrisant pas les pratiques de prévention ou se retrouvant dans des zones dépourvues d’infrastructures de santé. ( Jean Devun, 2014).
Les conséquences sur le capital des exploitations : les tempêtes, les pluies diluviennes, les crues, entraînent la destruction de bâtiments d’habitation ou d’élevage, surtout quand ils ne sont pas construits en dur, donc chez les paysans les plus pauvres. Les pertes de cheptel peuvent également être catastrophiques à la fois à court terme quand il s’agit d’outils de production - cheptel laitier, animaux de trait - mais également à plus long terme. Les troupeaux constituent en effet souvent un fonds d’assurance permettant aux familles de faire face à des périodes particulièrement difficiles ou à des évènements particuliers. Le retard dans l’arrivée des pluies, entraînant un décalage voire un échec des semis, et l’obligation de ressemer ; le décalage du cycle cultural qui s’ensuit a des conséquences négatives en chaîne. (Marchand et Rish : 2007). [5]
En Afrique de l’Ouest, certains producteurs signalent des problèmes d’enherbement plus importants quand les pluies démarrent tardivement, car les adventices se développent très rapidement, en même temps que la culture (d’autant plus lorsque, pour gagner du temps ou limiter les risques d’érosion, l’on a renoncé à travailler[6]. (Monsieur et Flosh : 2009).
Dégradation de la fertilité
Un autre phénomène très fréquemment signalé par les producteurs est une perte de fertilité des sols. Cette baisse de fertilité est d’autant plus sensible que l’emploi des engrais chimiques tend à diminuer pour des raisons économiques. L’érosion liée à la perte du couvert végétal joue un grand rôle dans la perte de fertilité[7]. (Benoıt Sanoussi et Luc Kafando : 2014)
Les agriculteurs qui en ont les moyens tentent de s’adapter ou, au minimum, de « résister » aux impacts du changement climatique, et mettent pour cela en jeu plusieurs mécanismes, au niveau individuel ou collectif. Certains privilégient des solutions de court terme, souvent peu durables. Parmi les phénomènes de dégradation du milieu sous l’effet conjugué des changements climatiques et des facteurs environnementaux, l’intensification de l’érosion est l’une des plus frappantes. Pour prévenir les phénomènes d’érosion ou récupérer des surfaces dégradées, la construction de terrasses peut constituer une solution. En diminuant la vitesse des eaux de ruissellement (pente réduite) elle favorise également leur stockage. Toutefois elle suppose des investissements relativement importants en énergie, travail humain ou engins.[8] (Emmanuel et Torquebiau 2014).
Notre continent dispose d’un immense potentiel qui doit lui permettre non seulement de se nourrir, d’éliminer la faim et l’insécurité alimentaire mais aussi de devenir un acteur majeur des marchés internationaux. L’Union africaine a choisi, il y a 10 ans, de faire de l’agriculture un des principaux piliers du Nouveau Partenariat pour le Développement de l’Afrique. L’agriculture représente une part essentielle de l’économie de tous les pays africains. Elle a donc son rôle à jouer dans la résolution de nos priorités continentales que sont l’éradication de la pauvreté et de la faim, la dynamisation du commerce intra-africain et des investissements, l’industrialisation rapide et la diversification économique, la gestion durable de nos ressources et de l’environnement et la création d’emplois, la sécurité et la prospérité partagée.[9] (Dr NKOSAZANA DLAMINI Zuma, 2014).
Depuis 2003, bien du chemin a été parcouru. Nous avons engagé un processus continental qui mobilise tous nos États- membres, les acteurs du secteur agro-alimentaire, et en premier lieu les organisations de producteurs, les institutions régionales et les institutions de coopération techniques. Ce processus reconnait que les femmes africaines représentent près de soixante- dix pourcents des agriculteurs et contribuent de façon primordiale à la production et à la sécurité alimentaires. Le Programme Détaillé de Développement de l’Agriculture Africaine (PDDAA) est le moteur de notre révolution agricole continentale qui passe par l’augmentation des investissements agricoles.
[1]HANSON. 2014
[2] KOKO CISHESA Toussain, Mémoire ISDR/BUKAVU Inédit.
[3] FAO 2010
[4] (www.changementclimatique.org
[5] Marchand et Rish : 2007
[6] Monsieur et Flosh : 2009
[7] Benoıt Sanoussi et Luc Kafando : 2014
[8] Emmanuel et Torquebiau 2014
[9] Dr NKOSAZANA DLAMINI Zuma, 2014