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CHAP II CADRE THEORIQUE

De façon classique, on définit la mortalité infantile, comme la proportion des enfants nés vivants qui meurent avant d’atteindre leur premier anniversaire.

Elle n’inclut que les enfants nés vivants et décédés dans leur première année de vie. Elle est divisée en 3 périodes décrites ci-dessous:
• La mortalité néonatale précoce (0 à 6 jours inclus)
• La mortalité néonatale tardive (7 à 27 jours inclus)
• La mortalité post-néonatale (28 jours à un an).

2.1.1 Causes de la mortalité Infantile
Les Causes de mort périnatale selon l’OMS  sont listées de la façon suivante :
• Causes Fœto-maternelles :
o prématurité,
o RCIU
o asphyxie périnatale,
o infections materno-fœtales
• Causes Fœtales :
o malformations congénitales
• Causes Maternelles :
o toxémie gravidique
• Causes Obstétricales :
o dystocies, anomalie annéxielles
La 1ère cause de mort périnatale reste la prématurité et/ou le RCIU.

Dans les pays à revenu intermédiaire et faible, plus de 3,5 millions de mères et d’enfants de moins de cinq ans meurent chaque année pour cause sous-jacentes de malnutrition et des millions d’autres sont handicapés à vie en raison des effets physiques et mentaux d’un apport nutritionnel trop pauvre durant les premiers mois de vie.

Selon le RASS 2000, le paludisme, la diarrhée, les infections respiratoires aigües (IRA) sont les principales causes de mortalité chez les enfants. En effet, selon les statistiques disponibles, le paludisme représente la première cause de morbidité et de la mortalité en Côte d’Ivoire chez les enfants de moins de cinq ans. Ce fléau constitue un véritable problème de santé publique. En 2006, l’incidence du paludisme dans la population générale était de 69,25%o. Pour les enfants de moins de cinq ans cette maladie avait une prévalence de 110,89%o.

Le plan stratégique national de lutte contre le VIH/SIDA 2006-2010 indique que Chez l’enfant, les IRA, le paludisme, la diarrhée et la malnutrition constituent les principales causes de morbidité et de mortalité

. Le paludisme a touché plus de 1.350.000 personnes environ pour cette même période. Certaines maladies à caractère épidémique tels que le choléra, les méningites purulentes et la fièvre jaune continuent d’être des menaces constantes sur l’état de santé de la population.

Selon le DSRP, le profil épidémiologique des enfants de moins de cinq ans en 2006 indiquait des incidences de : 110,89%o pour le paludisme, 83,96%o pour les infections respiratoires aiguës et 152,01%o pour les maladies diarrhéiques.

De plus, 33,9% des enfants souffrent de malnutrition chronique et 0,19%o de la rougeole. Les facteurs qui concourent à l’émergence des affections résident dans le manque d’hygiène du cadre de vie, l’insuffisance de conseils et d’informations aux mères, la faible pratique de l’allaitement exclusif et le sevrage précoce, la persistance des problèmes culturels et le faible taux d’alphabétisation des femmes.

Le même rapport indique que les maladies infectieuses et parasitaires représentent 60% de la morbidité diagnostiquée. Malgré les efforts du gouvernement, l’incidence des maladies endémiques reste toujours élevée, principalement chez les enfants. Ces maladies sont le paludisme, le VIH/sida, la tuberculose, la trypanosomiase. Au su de ces causes, il importe de décrire le phénomène afin de mieux appréhender ses caractéristiques.

2.1.2 Facteurs de la mortalité des enfants

La mortalité est un phénomène complexe qui dépend d’une variété de facteurs, et les cadres conceptuels élaborés pour tenter de les ordonner montrent la diversité des chemins possibles. Les modèles explicatifs de la mortalité des enfants distinguent, d’une part, les variables dites intermédiaires (les caractéristiques de l’enfant, les comportements procréateurs et les comportements en matière de soins et de nutrition) qui agissent directement sur les chances de survie de l’enfant et, de l’autre, les variables exogènes (économiques, socioéconomiques, culturels et environnementaux) dont l’influence est médiatisée par les variables intermédiaires (Mosley et Chen, 1984).

Nous distinguons ici, les variables liées à la mère des variables liées à l’enfant et des variables contextuelles. Nous présentons ci-dessous les relations générales entre ces variables et la mortalité des enfants rencontrées dans la littérature.

  1. a) Variables liées à la mère

a1) Comportements de la mère en matière de soins

Selon l’OMS, la manière dont la famille contribue à l’amélioration de la santé des enfants constitue ce qu’on appelle « les principales pratiques familiales ». Les comportements des mères en matière de soins de santé regroupent les pratiques en matière de la qualité des soins et de la qualité de la nutrition qui peuvent favoriser la croissance physique et le développement mental et prévenir la maladie. Par exemple lorsqu’un enfant est malade, sa mère doit se rendre compte qu’il y a un problème, dispenser les premiers soins, présenter l’enfant à un personnel de santé, élaborer avec celui-ci une ligne de conduite appropriée. Ces pratiques de la mère sont souvent ignorées, ce qui entraîne des décès chez les enfants.

a2) Qualité des soins

Les soins apportés à l’enfant commencent depuis la conception (les soins prénatals) jusqu’à après la naissance (les soins postnatals). La grossesse et l’accouchement constituent des périodes à risque pour la femme et l’enfant à naître. Ces risques peuvent être maîtrisés par des mesures de surveillance prénatale, une assistance qualifiée au moment de l’accouchement et de suites de couches. Les soins prénatals, l’assistance à l’accouchement et les soins postnatals réduisent significativement le risque de décès des enfants (les décès néonatals en particulier) du fait que s’ils sont détectés à temps, les soins accordés pendant ces phases permettent d’éliminer ou de diminuer leur impact sur l’état de santé de la mère et de l’enfant.


  • Visites prénatales

Durant les premières années de vie, la santé de l’enfant dépend des conditions de grossesse; le régime de la mère pendant sa grossesse est important pour la santé de l’enfant. Les affections telles que le paludisme, l’anémie (causes déterminantes du faible poids de l’enfant à la naissance) sont facilement dépistées et traitées lors des visites prénatales. Lors de ces visites, on peut assurer l’immunisation de la mère contre le tétanos et fournir des suppléments nutritionnels à la femme présentant des signes de malnutrition (Dackam, 1987).

Selon Grenier et Gold (1986, cité par Harouna, 1998), à travers le cordon ombilical, la mère transmet au fœtus certaines substances immunitaires au moment de la grossesse. La sécrétion de la plupart de ces substances est assurée par la qualité de son alimentation et l’administration de certains produits médicaux pendant la grossesse. Au fur et à mesure que la grossesse avance, l’organisme de la mère s’affaiblit et la sécrétion des substances immunitaires baisse en quantité et en qualité. Le suivi médical de la grossesse permet de pallier ces insuffisances et de maintenir la sécrétion à un niveau constant et nécessaire pour la protection future du nouveau-né.

 Vaccination antitétanique

La vaccination antitétanique vise à immuniser les mères contre le tétanos et surtout à prévenir le tétanos qui menace les enfants nés à domicile sans précaution d’asepsie en particulier. Le nombre de doses de vaccins antitétaniques et le respect du calendrier de la vaccination ont une influence sur la protection du foetus et du nouveau-né. Ils permettent de réduire la part des facteurs endogènes dans la mortalité des enfants. Pour une protection complète, une femme enceinte devrait recevoir deux doses de vaccin. Dans une étude menée en Inde, Venkatacharya et Tesfay (1986) ont constaté que les décès néonatals attribuables au tétanos par exemple représentent 60% de tous les décès de cet âge. Une autre étude menée au Sénégal par Leroy et Garenne (1989) a montré que le tétanos était responsable de 31% des décès néonatals entre 1983 et 1986.

  • Lieu et assistance à l’accouchement

Plusieurs études, notamment celles menée par Venkatacharya et Tesfay en 1986 en Inde et par Desgrées Du Loû en 1996 au Sénégal montrent que la mortalité néonatale diminue lorsque la mère sont assistées par des sages-femmes ou des agents médicaux compétents au moment de l’accouchement. Ces mêmes constats ont été faits au Sénégal par Garenne et Leroy (1989). Parmi les avantages d’un accouchement en milieu médical, on peut relever les conseils pratiques donnés à la femme pendant le travail pour assurer un meilleur accouchement, la réduction au minimum du risque de contamination de l’enfant, par le tétanos par exemple, au cours du travail à travers l’administration des soins adéquats et de l’accouchement. Selon Grenier et Gold (1986), l’enfant court un risque très élevé d’infection par les maladies telles que le tétanos au moment du passage dans la filière génitale maternelle. Des soins particuliers sont administrés contre ces types d’infections pour les accouchements qui ont eu lieu dans les centres de santé. Le personnel de santé administre les premiers soins médicaux postnatals à l’enfant qui sont très déterminants pour l’état de santé de l’enfant.

 Vaccination de l’enfant

Après leur naissance, les enfants doivent bénéficier de soins qui permettront de préserver leur santé contre un certain nombre de maladies. Cette préservation se fait sous forme de vaccination. En effet, l’OMS recommande un programme élargi d’immunisation des enfants avant leur premier anniversaire contre les différentes maladies de l’enfance. Ce programme recommande essentiellement la vaccination contre la rougeole, la poliomyélite, la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la tuberculose dans des pays comme la RDC.

On observe une relation négative entre la vaccination et la mortalité des enfants. Aux enfants ayant reçu des vaccinations correspond un faible risque de décès. Une étude réalisée au Sénégal sur l’impact de la vaccination a montré que la vaccination contre la rougeole est très indiquée pour la survie de l’enfant; elle souligne que la réduction de la mortalité entre six mois et trois ans du fait de la vaccination contre la rougeole serait de 30,9% (Garenne; Cantrelle, 1985 cité par Dackam, 1987). Dans une autre étude de Desgrées Du Loû dans la zone rurale de Bandafassi au Sénégal, il a été relevé le rôle déterminant qu’a pu jouer le Programme Elargi de Vaccination dans les régions du Sénégal éloignées de la capitale et pauvres en équipements sanitaires. Dans cette dernière étude, non seulement la mortalité des enfants a baissé brutalement dans la zone étudiée après l’introduction des vaccinations mais en plus la poursuite de la baisse a été étroitement liée au niveau de couverture vaccinale.

a3) Qualité de la nutrition

La nutrition est un élément très important pour préserver les maladies et les décès chez les enfants dans les pays en développement. En matière de nutrition, l’information la plus disponible concerne la malnutrition des jeunes enfants. Celle-ci contribue pour plus d’un tiers à la mortalité infantile et juvénile dans de nombreux pays africains (Banque Mondiale 1994) et pour 20 à 80% à la mortalité maternelle.

Allaitement de l’enfant

Parmi les mesures concernant la préservation de la santé du nouveau-né, l’allaitement maternel est probablement le plus universellement encouragé. Il est aussi celui dont l’évolution pourrait remettre en cause la santé des mères et des enfants. L’effet positif de l’allaitement sur la survie des enfants n’est plus à démontrer et constitue l’argument sur lequel on se base pour organiser la lutte contre la tendance à le remplacer par une alimentation artificielle. En effet, le lait maternel secrété par la mère pendant les premiers jours qui suivent la naissance de l’enfant protège le nourrisson contre les infections les plus courantes surtout celles des appareils respiratoires et digestifs (Akoto, 1993). Un bébé alimenté avec le lait maternel est moins souvent malade et de moins en moins malnutri qu’un bébé nourri au biberon avec d’autres aliments. Dans une collectivité pauvre, un enfant de moins de six mois nourri au biberon court 3 fois plus de risque de mourir qu’un enfant nourri au sein. Le mode d’allaitement et la durée d’allaitement contribuent à la mortalité des enfants à travers la prédisposition de l’enfant aux risques d’infection et de malnutrition (Dackam, 1987). Le sevrage partiel ayant lieu avant quatre mois ou après six mois peut augmenter le risque de décès des enfants. Après six mois, le lait maternel seul ne suffit plus pour assurer une nutrition adéquate (Akoto, 1990).

Aliments de complément

L’OMS recommande que tous les enfants de 4-6 mois reçoivent des aliments de complément en plus du lait maternel car, à cet âge, le lait maternel n’est plus suffisant à lui seul pour couvrir les besoins nutritionnels de l’enfant pour lui assurer une croissance optimale. Pour la mère n’ayant pas la possibilité d’allaiter exclusivement ses enfants au sein, l’allaitement mixte permet de prolonger la plupart des bénéfices de l’allaitement maternel. D’un autre côté, c’est au moment du sevrage que l’enfant risque de ne plus se trouver dans des conditions nutritionnelles et sanitaires optimales. Lorsque l’alimentation de complément est pauvre, l’enfant est exposé à des risques élevés d’infection. La sous nutrition et la malnutrition affectent le système immunitaire et engendre le marasme et le kwashiorkor (Harouna, 1998). Ces derniers s’associent à un déficit immunitaire pour rendre l’enfant particulièrement sensible à certaines maladies infectieuses et parasitaires comme la rougeole.

a4) Age de la mère à l’accouchement

La procréation précoce ou tardive influe négativement sur la survie de l’enfant. En effet, les études sur les facteurs de la mortalité infantile et juvénile montre une corrélation entre l’âge de la mère à l’accouchement et le niveau de la mortalité des enfants. Le risque de décès des enfants nés des femmes âgées de moins de 20 ans ou de plus de 35 ans est relativement plus élevé que celui des enfants nés des mères des autres groupes d’âges (Akoto et Hill, 1988). A Bamako (Mali) et Bobo-Dioulasso (Burkina Faso), ce risque est de 45% plus élevé chez les enfants nés des mères âgées de moins de 18 ans, de 15% plus élevé chez ceux des mères âgées de 18-20 ans par rapport à celui des enfants nés des mères âgées de 20 à 34 ans (Legrand et Mbacké, 1992, cité par Rakotodrabé, 1996).

Le risque de décès infantile et juvénile est lié à l’âge de la mère à l’accouchement pour des raisons physiologiques et comportementales. En général, les femmes qui accouchent très jeunes au moment où leur propre développement n’est pas encore achevé, ont plus de chance de mettre au monde un enfant de faible poids, ce qui augmente son risque de décès (Akoto et Hill, 1988). Ces femmes ne sont pas expérimentées et peuvent avoir des comportements inappropriés en matière de soins et de nutrition (en cas de non-assistance) pour les enfants ce qui augmenterait le risque de décès (Legrand et Mbacké, 1992, cité par Rakotodrabé, 1996). En ce qui concerne les femmes ayant un âge élevé (35 ans et plus), elles courent des risques divers (fausses couches, malformation congénitale) liés au vieillissement (syndrome d’épuisement maternel) et peuvent connaître des difficultés d’allaitement pour le dernier-né, ce qui diminue sa "protection maternelle" (Akoto, 1985). En outre, ces femmes sont plus sensibles aux maladies telles que le diabète ou l’hypertension, maladies qui affectent la santé de l’enfant (Echarri, 1994).

  1. b) Variables liées à l’enfant

b1) Sexe de l’enfant

Le Burkina est un pays où la procréation est valorisée et ce, quel que soit le sexe du nouveau-né. Au moment où dans les pays développés la surmortalité féminine a disparu à tous les âges, toute surmortalité féminine observée est en soi un signe de différence ou de discrimination entre les deux sexes. En effet, la recherche des différences de mortalité selon le sexe a montré que le désavantage féminin à partir de l’âge d’un an, des jeunes filles pendant la période de puberté, et des femmes aux âges de reproduction qui a caractérisé l’ensemble des pays de l’Europe dans le passé, n’a complètement disparu que vers les années 1920. Ce même désavantage féminin est encore présent dans de nombreux pays en voie de développement en particulier chez les petites filles (1-4 ans) ou aux âges de reproduction.

Toutefois, dans la plupart des pays on observe une surmortalité infantile des personnes de sexe masculin (Dackam, 1987). Dans les pays en développement la mortalité infantile masculine est près de 16% plus élevée que celle des petites filles (Rustein, 1984 cité par Dackam, 19987). Akoto (1985) a noté que les garçons sont plus vulnérables à la naissance alors qu’une fois les premiers mois franchis, la résistance des enfants aux agressions extérieurs dépend en grande partie du comportement social à l’égard des garçons et filles.

b2) Intervalle Inter génésique


L’intervalle inter génésique est le temps écoulé entre deux naissances. C’est l’une des variables liées à l’enfant à travers laquelle on peut appréhender le risque de décès des enfants. Plus l’intervalle inter génésique est important, plus grande est la chance de survie de l’enfant. Un intervalle inter génésique inférieur à deux ans entraine non seulement le sevrage de l’enfant précédant mais aussi un mauvais état nutritionnel et une fragilisation ; lorsque les deux enfants survivent, il apparait un risque de concurrence pour la nourriture et les soins apportés par la mère : effet de compétition (DRESGREES DU LOÛ, 1996). Les principaux mécanismes à travers lesquels de brefs intervalles inter génésiques précédents augmentent les risques de décès durant la première année de vie sont essentiellement les suivants: - maternal depletion syndrome (syndrome d’épuisement maternel): fait référence aux conséquences d’accouchements rapprochés sur l’organisme féminin qui n’est pas en mesure de récupérer toutes ses fonctions, augmentant ainsi le risque d’un accouchement précoce et d’un bébé de petit poids à la naissance ; - exposition aux infections : la présence d’enfants nés à brefs intervalles l’un de l’autre augmente le risque de contracter des maladies (AABY, 1992) ; - effet de compétition : nés à peu de distance l’un de l’autre les enfants sont exposés à un plus haut risque de mortalité car ils se trouvent encompétition pour les ressources familiales.
Le rapprochement des grossesses peut en outre entraîner une carence ou une déficience physiologique de la mère et peut donc avoir une conséquence néfaste : faible poids à la naissance ou une prématurité des enfants (BARBIERI, 1991). L’allaitement, un facteur nutritionnel, relevant donc de la catégorie "carences nutritionnelles" a été identifié comme principalement responsable des différences de mortalité observées, le mécanisme est double : d’une part, des grossesses rapprochées affaiblissent la mère, dont la capacité à allaiter le nouveau-né se trouve ainsi diminuée; d’autre part, un enfant encore allaité lorsque sa mère conçoit à nouveau est sevré prématurément, car le changement hormonal associé à la grossesse interrompt en général (ou, en tous cas, ralentit) toute montée de lait .Le risque de décéder avant l’âge de deux ans est deux fois plus élevé lorsque l’intervalle intergénésique est court que lorsqu’il est long (KUATE DEFO,1997).

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