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INTRODUCTION

S’il existe un point sur lequel décideurs, professionnels et théoriciens dans le domaine de l’économie de la santé sont d’accord, c’est bien le fait que, dans le monde en développement les complications qui surviennent pendant la grossesse et à l’accouchement sont la principale cause de mortalité maternelle et d’infirmité.  En 2001 on estimait à 515 000  le nombre de femmes faisant partie de cette tranche et qui mourraient annuellement du fait des complications susévoquées. Pour chaque femme qui meurt, une trentaine d’autres subissaient des blessures, des infections ou des lésions durant la grossesse et/ou à  l’accouchement. Ce qui signifie que, chaque année, la santé d’au moins 15 millions de femmes se trouvait ainsi altérée (OMS, UNICEF, FNUAP, 2001)

C’est ainsi que,  lors du sommet du millénaire en septembre 2000, les Chefs d’Etats de la planète s’étaient fixés l’objectif de réduire de 75% la mortalité maternelle à l’horizon 2015 (Torres, 2004). Néanmoins, malgré les stratégies mises en  œuvre par les acteurs du domaine de la santé, plusieurs régions dans le monde n’ont pas atteint ces objectifs. En 2015, lors de l’évaluation, la situation a relevé que le taux de mortalité maternelle demeure encore de plus en plus élevé.

A  l’échelle mondiale, le rapport de mortalité maternelle (RMM)  a certes chuté de près de 44 % au cours des 25 dernières années, passant d’environ 385 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 1990 à 216 décès en 2015. Le nombre annuel des décès maternels a reculé de 43 %, passant d’environ 532 000 en 1990 à environ 303 000 en 2015. Le risque de décès maternel sur la durée de vie entière a considérablement baissé, passant d’environ 1 sur 73 à 1 sur 180 dans le monde (OMS, 2015). 

Cependant, la situation reste dramatique en ce qui concerne les régions en développement, environ 99 % (302 000) des décès maternels enregistrés dans le monde en 2015 sont survenus dans ces régions, l’Afrique subsaharienne représentant à elle seule 66 % des décès (201 000), suivie de l’Asie du Sud (66 000) (Ahmed & Mesbah, 2016).

En RDC avec un taux de fécondité  élevé (EDS-RDC, 2014) et en dépit des efforts dans l’application des mesures pour  la réduction de taux de mortalité maternelle, l’analyse situationnelle en a démontré que la santé de la reproduction y demeure caractérisée par un taux de mortalité maternelle, néonatale et infantile très élevé, une prévalence contraceptive très faible et un taux très élevé d’avortements et souvent mortels chez les adolescentes.  Un taux de mortalité maternelle de 693 décès pour 100 000 naissances vivantes en 2015, un taux d’évolution moyen annuel de 21, 2% entre 1990-2015  (OMS, 2015); la RDC figure parmi les pays africains ayant un taux élevé de mortalité maternelle, où la santé de la mère demeure une préoccupation majeure. Et aussi comparativement aux objectifs du millénaire, le pays est encore loin de l’objectif de réduction de trois quart du taux de mortalité maternelle. 

Ce fléau est due aux crises successives que le pays a connues depuis son accession à l’indépendance, qui ont occasionné un dysfonctionnement du système sanitaire et une dégradation des infrastructures sanitaires; ce qui a eu un effet désastreux sur les indicateurs de la santé particulièrement ceux relatifs à la santé maternelle. C’est ainsi qu’au lieu de connaitre une évolution significative en termes d’OMD, c’est-à-dire la baisse conformément aux prévisions faites, le pays ne présente pas les indicateurs pouvant assurer l’atteinte de ces dits objectifs et moins encore ceux relatifs au développement durable.  

Dans un tel contexte, le risque de complication de grossesse ou de mortalité maternelle n’est pas le même pour tout le monde. En effet, des  inégalités d’accès et d’utilisation des services de santé prénataux se construisent, associées généralement aux facteurs socioéconomiques, financiers, infrastructures, …  propres à la femme et à son environnement (Nations Unies 2010).  La couverture en soins prénataux suffisants qui s’élevait à seulement 48% en 2014, concernait à hauteur de 61% les zones urbaines contre 42% en zones rurales, une femme sur dix n’a effectué aucune visite prénatale. Sur la même période,  19 %  des femmes ont accouché à domicile, 1% de femmes ont accouché sans aucune aide  (EDS-RDC, 2014). 

La problématique d’accessibilité aux structures sanitaires a fait l’objet de plusieurs recherches. (Cissé, 2001), montre que l’accès aux soins de santé dans la région d’Afrique subsaharienne est lié surtout, non seulement à l’état de la santé perçu par l’individu, mais également à des facteurs économiques et sociaux comme  le revenu, le prix des services et des biens, la distance,  les moyens et coût de transport qui séparent le patient du centre de santé. 

(Beninguisse, 2001) oriente ses idées sur une approche purement culture et met en évidence l’anthropologie pour expliquer les disparités d’accès aux soins de santé. Cette approche met en relation la fréquentation des services de santé avec les institutions sociales telles que la religion, et permet ainsi, d’appréhender les comportements des femmes vis-à-vis du système de soins pendant les différentes étapes relatives à leur maternité. 

Certes les déterminants de la mortalité maternelle en Afrique subsaharienne en général et en RD Congo en particulier sont relativement connus et constituent une combinaison des inégalités socioéconomiques et sanitaires. Il convient toutefois, de procéder à une analyse plus approfondie  des inégalités sociales d’accès et d’utilisation de soins prénataux en RDC entre les années 2001 et 2014 afin d’orienter les programmes et d’intensifier le plaidoyer en faveur de lutte contre la mortalité maternelle. 

Eu égard à ce qui précède, ce travail aura comme base de recherche la question principale :

« Existe-t-il des inégalités  socioéconomiques d’accès et d’utilisation de soins de santé prénataux en République Démocratique du Congo entre les années 2001-2014 ? ».  Ainsi qu’une autre question sous-jacente : « Quel serait le lien de causalité de déterminants socioéconomiques à l’accès et l’utilisation de soins de santé prénataux en RDC pour les années sous-études ? ». 

En s’appuyant aux conclusions  de travaux de  (Mohammad, Nazmul, & Arijit, 2014) pour le cas de Bangladesh et de (Nanfosso T. & Kasiwa M., 2013) pour le cas   la RDC, on estime  que les inégalités d’accès et d’utilisation de soins de santé prénataux  existeraient et seraient influencées plus par les caractéristiques socioéconomiques  et environnementales des femmes enceintes à savoir : âge,  milieu de résidence, statut social, niveau d’éducation, taille du ménage,

… 

De manière générale, les objectifs du millénaire n’ont pas été  atteints. C’est ainsi qu’aujourd’hui le monde est tourné vers les objectifs de développement durable dont l’objectif 3  vise à faire passer le taux mondial de la mortalité maternelle au-dessous  de 70  décès pour

100000 naissances vivantes et qu’aucun pays ne présente  un taux de mortalité maternelle supérieur à deux fois la moyenne mondiale ici 2030 (OMS, 2015). Il est alors impérial  pour  les chercheurs et autres acteurs sanitaires d’examiner les causes liées à l’échec des objectifs du millénaire pour permettre ainsi les pays d’entreprendre les stratégies  qui conduiront  à cette nouvelle cible.

Ainsi cette recherche se fixe comme objectifs d’estimer l’ampleur des déterminants socioéconomiques d’accès et d’utilisation des soins de santé prénataux sur les inégalités en santé prénatale en RDC entre 2001-2014 et enfin prédire le lien de causalité de ces déterminants sur l’accès et l’utilisation de soins de santé prénataux. 

Pour atteindre ces objectifs, la recherche adoptera deux approches méthodologiques.

Premièrement, il sera question de l’approche non paramétrique qui consistera à calculer trois indices pour mesurer les inégalités en santé à savoir : indice de concentration,  indices relatif et absolu des inégalités (Kakwani, Wagstaff, & Van Doorslaeff, 1997) et enfin l’indice de Theil. Deuxièmement  une approche paramétrique qui consiste à formuler un modèle économétrique qui va permettre à son tour  d’établir une relation entre l’accès et l’utilisation de soins de santé prénataux et les déterminants  socioéconomiques  et environnementaux retenus  selon le modèle d’Andersen tel que l’âge, le quantile de bien-être, milieu de résidence, niveau d’étude de la mère , taille de ménage, …. en utilisant les bases des données  de l’EDS-RDC (2007, 20132014) combinée de celle de MCIS-RDC (2001) à l’aide de logiciel stata 12. 

Cette recherche mettra donc à la vue du monde en général, et des autorités sanitaires congolaises en particulière ; une petite lumière sur les sources des inégalités sociales en santé de reproduction  entre les années 2001 jusqu’en 2014 afin qu’ils puissent intervenir  et intégrer les différentes stratégies suggérées dans  le plan sanitaire pour remédier  tant soit peu à ce fléau  pour enfin prendre un bon élan dans l’atteinte de l’objectif 3 de développement durable. 

Outre l’introduction et la conclusion, ce travail est articulé autour de trois chapitres à savoir : Le premier chapitre porte sur les généralités de notre sujet, notamment sur la revue de la littérature au plan théorique et empirique.  Le deuxième chapitre présente la méthodologie  utilisée pour  atteindre les objectifs assignés par le travail, enfin le troisième donnera l’analyse et la discussion des résultats.

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