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CHAPITRE 2 : LE CONTROLE PARLEMENTAIRE COMME INSTRUMENT D’AMELIORATION DE LA BONNE GOUVERNANCE ET DE L’ETAT DE DROIT EN REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO. « Un

« Une société qui, à tous les niveaux, désire véritablement demeurer au service de l’être humain, est celle qui se fixe le bien commun pour objectif prioritaire, dans la mesure où c’est un bien appartenant à tous les hommes et à tout l’homme[1]

C’est ainsi que dans un Etat démocratique où le contrôle parlementaire est effectif et efficace constitue un véritable vecteur de la bonne gouvernance ainsi que la garantie de l’Etat de droit.

      C’est ainsi que pour donner sens à ce chapitre, il est utile de parler dans un premier temps de la bonne gouvernance (section 1ère) afin de mieux comprendre les notions sur l’Etat de droit (section deuxième).

SECTION I. LE CONTROLE PARLEMENTAIRE COMME INSTRUMENT  DE LA BONNE GOUVERNANCE.

« La bonne gouvernance constitue actuellement le mot le plus cité dans les discours des politiciens et des intellectuels congolais. D’aucuns pourraient alors se demander si la bonne gouvernance est un slogan ou une règle pour conduire les affaires publiques de l’Etat afin d’atteindre les objectifs de tout gouvernement à l’occurrence le développement socio-économique, l’épanouissement de l’Homme et l’amélioration du bien être des congolais ».60

      Par essence, dans un pays démocratique, où le contrôle juridictionnel sur les gouvernants, l’indépendance de la justice, le respect de l’ordre juridique, l’égalité des sujets devant le droit et la protection des droits et libertés individuelles sont effectifs et efficaces, constitue un véritable vecteur de la bonne gouvernance.

L’Etat de droit exige que les personnes publiques et les gouvernants soient soumis, au même titre que les particuliers, au respect de l’ordre juridique et que ce dernier soit sanctionné en dernier ressort par le juge.61

      Afin de répondre effectivement à ces préoccupations, il importe avant tout d’examiner la notion du concept « bonne gouvernance » (§1) puis la bonne gestion des ressources publiques dans un pays où règne la bonne gouvernance (§2).

§1. LA NOTION DE BONNE GOUVERNANCE.

      La compréhension de la notion de Bonne gouvernance reste indispensable pour une bonne culture démocratique dans notre pays et une conduite irréprochable dans la gestion des personnes et des biens communautaires.  

      Ce mot vient du verbe « gouverner » qui fait son apparition au 11e siècle et qui signifie diriger, conduire, mener.

Lorsqu’il est question des affaires politiques, on parle de « gouvernement », apparu au 12e siècle, « gouvernance est utilisée à partir du 13e siècle, mais ce mot n’avait pas le sens qu’aujourd’hui on lui donne.6

C’est à partir de 1990 qu’il est clamé par les dirigeants politiques de l’occident pour aider les leaders politiques, surtout africains, à bien conduire les affaires de leurs Etats.

La gouvernance peut se définir comme un ensemble de mécanismes liés à l’organisation, au fonctionnement et à la gestion de tel ou tel domaine d’activité de l’Etat.63

Selon le rapport national en développement Humain 2000, PNUD définit la gouvernance comme les voies et moyens d’exercer l’autorité politique, économique et administrative par la conduite des affaires d’un pays dans le triple but d’assurer :

       

  • La cohésion sociale,
  • L’intégration et
  • Le bien-être de la population.

      En fait, lorsque la gestion échoue et capote on parle de mal gouvernance au lieu de bonne gouvernance. C’est ainsi qu’il est nécessaire de voir la définition de la bonne gouvernance (A) avant de consulter ses caractéristiques (B), afin de mieux comprendre les dimensions de la bonne gouvernance(C).

A.    DEFINITION DE LA BONNE GOUVERNANCE.

La bonne gouvernance, c’est l’ensemble de procédures institutionnelles, de rapports des pouvoirs et de modes de gestion des affaires publiques ou privées, formels aussi bien qu’informels qui régissent notamment l’action publique réelle.

Elle est un ensemble de mécanismes, de processus et d’institutions par le biais desquels les citoyens et les groupes expriment leurs intérets, exercent leurs droits juridiques, assument leurs obligations et auxquels ils s’adressent en vue de régler leurs différends.64 Par rapport à ceux qui précédent, la gouvernance, venant de gouverner, peut être considérée comme une manière de diriger et de régir les personnes ou les choses. C’est l’exercice de l’autorité économique, politique et administrative en vue de gérer les affaires d’un pays à tous les nivaux. Elle englobe les mécanismes, les processus et institutions par les biais desquels les citoyens et les groupes expriment leurs intérêts, exercent leurs droits juridiques, assument leurs obligations et auxquels ils s’adressent en vue de régler leurs différends.   

B. LES CARACTERISTIQUES DE LA BONNE GOUVERNANCE.

La bonne gouvernance est caractérisée par :

La participation active : de la population dans la prise des décisions sur les problèmes qui la concerne.

Le respect des droits : de la personne humaine.

La primauté du droit : il ya une application de la loi pour une justice distributive dans un Etat de droit.

La transparence : dans la gestion, les systèmes financiers et fiscaux.

La responsabilisation : sanction en cas de faute.

L’efficacité : méritocratie à la place du clientélisme

L’équité : répartition équitable des ressources communautaires

8° La séparation et l’indépendance de différents pouvoirs : (Exécutif, législatif et judiciaire).

Les élections : accessions aux charges politiques par la voie des élections.

10° Capacité et efficacité dans l’administration ;

11° La lutte contre la corruption et la dimension saine de l’armée ;

12° La liberté de la presse et la liberté d’opinion ;

13° La prévisibilité des comportements par l’émergence de l’approche prospective (avoir une vision prospective, gouverner c’est prévoir) ;

14° Lier la théorie à la pratique ; etc.

C. LES DIMENSIONS DE LA BONNE GOUVERNANCE.

      La bonne gouvernance présente des dimensions diverses parmi lesquelles nous avons :

  • La gouvernance politique : qui est le processus de prise de décisions en rapport avec l’élaboration des politiques.
  • La gouvernance économique : qui recouvre les processus de prise des décisions qui ont une incidence sur les activités économique du pays et des relations économiques avec les autres pays. Ceci a des répercussions importantes sur l’équité, la pauvreté et la qualité de la vie.
  • La gouvernance administrative : qui est le système de mise en œuvre de ces politiques, c’est-à-dire l’organisation des rapports entre gouvernants et gouvernés.
  • La gouvernance sociale : concerne les mécanismes d’accès des citoyens aux sociaux de base (éducation, santé, emploi et logement).

      Comme on peut le constater, la Bonne gouvernance exige les actions combinées de plusieurs acteurs et leurs mobilisations dans un élan de solidarité et de cohésion sociale, de partenariat, de participation et d’équité. Elle suscite des synergies constructives entre les participants et les acteurs, comme par exemple :

- L’Etat comme garant d’un environnement politique, juridique et macroéconomique indispensable à la réalisation des activités par d’autres secteurs ;

- Le secteur privé dans son rôle de création d’emplois et de générateur des revenus ;

- La société civile en tant que population organisée en réseaux thématiques pour la défense de ses intérêts politiques, économiques et sociaux.    

§2. LES EFFETS DU CONTROLE PARLEMENTAIRE : LA BONNE GESTION DES RESSOURCES PUBLIQUES.

      La bonne gestion des ressources disponibles pour les plus grands biens du propriétaire originel, en l’occurrence les populations, sources de légitimité des autorités publiques.

      S’agissant du contrôle sur la bonne gestion des ressources, retenons qu’en RDC, le parlement engage un débat public sur les ressources extérieures à l’occasion du dépôt annuel par le gouvernement du projet de loi de finances. Au cours de l’exécution du budget, chaque membre du parlement peut également mettre en œuvre les divers moyens de contrôle prévus par la constitution pour s’informer sur la gestion par le gouvernement des ressources extérieures, demander la constitution d’une commission d’enquête, ou proposer le contrôle par la cour des comptes du compte général du trésor.

      Le contrôle exercé par le parlement sur l’exécution de l’APD (Aide Publique au Développement) présente les mêmes insuffisances et limites relevées dans le contrôle parlementaire en général. Les limites du modèle parlementaire entachent le débat et le contrôle sur l’exécution du budget en général et de la gestion des ressources extérieurs en particulier.       

Ceci implique qu’il faille éviter de confondre le bien public du bien privé.65 La question de la bonne gestion fait appel à certains aspects qui la complètent et la rendent plus intelligible :

La transparence : L’action des décisions et la prise des décisions des administrations publiques sont, dans certaines mesures, ouvertes à l’examen des autres secteurs de l’administration, du parlement, de la société civile et parfois d’institution.

La réceptivité : Les autorités publiques ont les moyens et la flexibilité voulus pour répondre rapidement à l’évolution de la société, tiennent compte des attentes de la société civile lorsqu’elles définissent l’intérêt général et elles sont prêtes à faire l’examen critique du rôle de l’Etat.

L’obligation de rendre compte : Les administrations publiques sont capables et désireuses de montre en quoi leur action et leurs décisions sont conformes à des objectifs précis et convenus.

L’efficience et l’efficacité : Les administrations publiques s’attachent à une production de qualité, notamment dans les services rendus aux citoyens et veiller à ce que les prestations répondent à l’intention des responsables de l’action publique.

La primauté du droit : Sans pour autant être une répétition, les autorités publiques font appliquer les lois, les règlements et les codes en toute transparence.

La prospective : Les autorités publiques sont en mesure d’anticiper les problèmes qui se poserons à partir des données disponibles et tendances observées, ainsi que d’élaborer des politiques qui tiennent compte de l’évolution des couts et des changements prévisibles.

A part ces aspects qui illustrent la bonne gouvernance dans un Etat de droit, il existe en République Démocratique du Congo la cour des comptes qui, compétente aux recours des services publics, la cour des comptes s’avère pertinente dans le cadre du contrôle parlementaire surtout de ce qui est de la bonne gestion des ressources publiques. Nous en passerons en revis. 

       

      C’est ainsi qu’il se constate que la plus part des aspects ci-hauts énumérés ne sont pas le propre des autorités publiques congolaises, chose qui ne fait que naitre l’écart entre la bonne gouvernance et la gestion en RDC.

SECTION 2 : LE CONTROLE PARLEMENTAIRE COMME INSTRUMENT                                            D’AMELIORATION DE L’ETAT DE DROIT.

« Tout Etat qui se respecte est désormais tenu de se présenter sous l’aspect avenant, de se parer des couleurs chatoyantes de l’Etat de droit ».45

      L’Etat de droit est aujourd’hui une notion d’actualité. Il exige que les personnes publiques et les gouvernants soient soumis, au même titre que les particuliers, au respect de l’ordre juridique et que ce respect soit sanctionner en dernier ressort par un juge.

      Dans un Etat qui se veut démocratique, l’effectivité et l’efficacité du contrôle parlementaire demeure l’essence pour l’amélioration de l’Etat de droit. Dans cet angle de raisonnement, le contrôle parlementaire efficace constitue un vecteur de l’Etat de droit, celui-ci étant entendu comme le respect d’un certain nombre de valeurs.

L’Etat de droit postule l’existence d’un ordonnancement juridique formellement et surtout matériellement hiérarchisé. Il est presque devenu le corollaire de la démocratie libérale. Il constituerait même une étape supplémentaire et un perfectionnement par rapport à la démocratie46. L’existence d’une bonne gouvernance, la défense du droit  ou du devoir d’ingérence et la subordination de l’aide au développement à la démocratie libérale sont encore des signes et des manifestations des contraintes liées à la notion de l’Etat de droit. A ce propos, on peut lire chez Anne-Céline ROBERT : « L’Etat de droit est devenu au fil des années, l’étalon de mesure de la démocratie à travers le monde. Les organismes internationaux y ont notamment recours pour apprécier l’avancée des transitions politiques à l’Est et en Afrique et octroyer leurs aides au titre de la conditionnalité.47  Il fait partie des critères qu’un Etat doit remplir pour mériter le label de bonne gouvernance.

      C’est ainsi que dans un premier temps, nous allons parler sur les notions de l’Etat de droit (§1), afin d’aboutir à l’Etat de droit comme corollaire de la bonne gouvernance (§2).

§1. LA NOTION  D’ETAT DE DROIT : ESSAI DE DEFINITION.

L’Etat de droit ou la primauté du droit est une situation juridique dans laquelle chacun est soumis au respect du droit, du simple individu jusqu’à la puissance publique.48  La définition de l’Etat de droit résultera de l’examen de ses différents aspects (A) et de ses objectifs (B).

A. LES ASPECTS DE L’ETAT DE DROIT.

      Il n’est pas inutile de se livrer à la quête du sens qu’il faut donner à la notion de l’Etat de droit.

      En effet, la notion d’Etat de droit, brusquement propulsée sur la place publique, a connu une surcharge de signification qui lui donne une coloration nouvelle. Devenu la référence de tout discours politique, l’Etat de droit peut apparaitre comme une catégorie fourre-tout qui recouvre des significations multiples et parfois contradictoires. Nous examinerons successivement la genèse de l’Etat de droit(I) avant de parler sur son contenu(II).

  1. LA GENESE DE L’ETAT DE DROIT.

      Né en Allemagne à la fin du XIXe siècle, la notion d’Etat de droit permet de prémunir la société contre les concentrations et les excès de pouvoir.

      Pour A. Bleckmann, l’expression « Etat de droit » a été inventée dans les années 1860 par deux auteurs allemands, Bahr et Gneist, pour trouver une solution juridique au contrôle par le juge des actes administratifs.

S’agissant de son contenu, F. J. Stahl était d’avis que l’Etat de droit est moins un dispositif de limitation du pouvoir de l’Etat qu’un moyen d’organisation rationnelle de travail de l’Etat et de juridicisation de ses rapports avec les administrés.4

A travers ces conceptions, écrit J. CHEVALIER, « on voit dès ce moment poindre les deux versions autour desquelles gravitera toute l’histoire de la théories de l’Etat de droit, l’une substantielle, qui s’attache au contenu du droit en vigueur, l’autre formelle, qui privilégie l’aménagement de l’ordre juridique étatique.50

      Mais très vite, l’aspect formel a pris le pas sur la garantie des droits individuels.

Cependant quelque soit l’aspect prépondérant, il apparait que, dans la doctrine allemande, l’Etat de droit se dresse contre le pouvoir monarchique.

      Depuis l’Allemagne, la notion aura un rayonnement sur toute l’Europe et, par la colonisation, sur les autres continents.

      En France, par exemple, l’évolution de la défense des droits et libertés face au pouvoir monarchique trouve son point de référence dans la révolution de 1789 qui a consacré d’une part l’égalité des citoyens par la suppression des privilèges et, d’autre part, la suprématie du parlement grâce à l’importance accordée à la loi, expression de la volonté générale, et à l’adoption de la souveraineté nationale.

      Importé en France par R.Carré de Malberg, la théorie de l’Etat de droit a donc rempli une double fonction :

-Une fonction cognitive, en permettant de mieux cerner les caractéristiques du régime politique, et

-Une fonction critique, en fournissant les arguments théoriques à l’appui de la dénonciation de l’omnipotence parlementaire.51

Si la notion d’Etat de droit a eu un tel rayonnement, c’est qu’elle renferme un certain contenu.

II. LE CONTENU DE LA NOTION DE L’ETAT DE DROIT.

      L’Etat de droit est celui dans lequel les mandataires, en démocratie ; les élus sont tenus par le droit qui a été édicté. Il correspond à un processus d’institutionnalisation du pouvoir et de limitation des prérogatives des gouvernants. Ce faisant, il se distingue de l’Etat de police et de l’Etat légal notions voisines qu’il englobe en même temps qu’il les dépasse.

      L’Etat de police n’est pas, comme on serait tenté de le croire, une situation de non-droit. Cette indentification résulte sans doute d’une assimilation trop facile entre institution administrative, en l’occurrence la police, avec pouvoir discrétionnaire et, par glissement sémantique, avec excès de pouvoir.

« Comme l’Etat de droit et à la différence du gouvernement despotique ou arbitraire, écrit J. Chevalier, l’Etat de police accorde une large place au droit, mais celui-ci est dépourvu de tout élément d’ambivalence, dénué de tout caractère de réciprocité : placé sous la ligne de l’unilatéralité, il n’est que l’expression de la suprématie étatique, l’enveloppe de la puissance ; servant à imposer des obligations aux administrés, il n’est pas en retour source de contrainte pour les gouvernants et l’administration »52

      L’Etat de police est celui dans lequel le droit applicable émane de l’exécutif, du gouvernement au sens strict du terme, tel qu’il s’exprime à travers les règlements et les mesures individuelles.

      Mais l’Etat de police se distingue de l’Etat de droit : alors que dans l’Etat de police, fondé sur le bon plaisir du prince, il n’ya ni véritable limite juridique à l’action du pouvoir, ni réelle protection des individus contre lui, dans l’Etat de droit les gouvernants se trouvent, soumis à des règles qui s’imposent à eux de façon contraignante.

L’Etat légal, en revanche, est marqué par le légicentrisme hérité de Rousseau et de l’idée que la loi, expression de la volonté générale, est par structure libérative53.

      L’Etat légal correspond à l’idée selon laquelle le corps législatif élu est l’autorité supérieure qui possède seule le pouvoir de décision initiale dans tous les domaines de la vie sociale et politique.

      Dans l’Etat de droit, le droit n’est plus seulement un instrument d’action pour l’Etat, mais aussi un vecteur de limitation de sa puissance. L’évolution du contenu de l’Etat de droit nous permet de le situer, à trois niveaux différents :

      D’abord, au niveau de la conception de l’ordre juridique étatique.

Dans ce cadre, l’Etat de droit renvoie alors à la hiérarchie des normes, à la soumission à la loi et à la possibilité offerte aux citoyens de formuler des recours devant un juge indépendant ;

      Ensuite, au niveau de la soumission de l’Etat au droit. 

En ce sens, l’Etat de droit renferme le principe de limitation subjective (autolimitation) ou objective de l’Etat ; et

      Enfin, au niveau du contenu du droit en vigueur.

Dès lors que l’Etat de droit inclut des valeurs et des principes visant à assurer aux citoyens des garanties effectives contre l’Etat.54

      En définitive, l’Etat de droit se situe sur un double plan d’analyse. D’un coté l’analyse juridique fait de la prééminence du droit la condition de l’accès à la juridicité, par la soumission à des normes sanctionnées par la censure du juge.

      De l’autre coté, l’analyse philosophique, d’inspiration libérale, qui, pour défendre les individus et les minorités, fait l’emprise du droit le moyen de conjurer l’oppression des gouvernants.

      Une fois consacrés par l’Etat de droit, les libertés et les droits fondamentaux vont acquérir une valeur supra-législative, voire supranationale, et vont servir de base pour une critique de la souveraineté des Etats. L’Etat de droit aura alors pour objectif d’encadrer et de limiter juridiquement le pouvoir.

B. LES OBJECTIFS DE L’ETAT DE DROIT.

      On oppose traditionnellement la notion d’Etat de droit et la notion raison d’Etat, même s’il est évident que tout Etat, qu’il soit ou non Etat de droit peut être amené à faire prévaloir ses intérêts nationaux sur toutes considérations.

L’autorité doit être aménagée de telle sorte que, fondée sur l’adhésion de ceux qui lui sont soumis, elle demeure compatible avec leurs libertés et leurs droits. 55 Cette compatibilité passe par la soumission de tous les pouvoirs publics au droit (A) et par le contrôle juridictionnel exercé sur les gouvernants (B).

I. LES EFFETS DU CONTROLE PARLEMENTAIE SUR L’ETAT DE DROIT : LA SOUMISSION DES POUVOIRS AU DROIT.

      La soumission des pouvoirs au droit suppose le respect par eux de l’ordre juridique établi. Dès l’instant où la proclamation des droits et libertés fait partie intégrante de l’ordre juridique, le respect du droit implique la protection des droits et libertés des citoyens. C’est ainsi qu’il ya :

  1. Le respect de l’ordre juridique.

L’existence d’une hiérarchie des normes constitue l’une des plus importantes garanties de l’Etat de droit. La théorie de l’Etat de droit implique une conception de la démocratie dans laquelle les représentants élus sont tenus au respect des règles juridiques supérieures.56

      Dans ce cadre, les compétences des différents organes de l’Etat doivent être précisément définies et les normes qu’ils édictent ne sont valables qu’à condition de respecter l’ensemble de normes de droit supérieures.

      Le progrès de la démocratie et de l’Etat de droit a d’abord conduit à renforcer les prérogatives  de parlement, porteur de la volonté générale.

Aussi, la loi, expression de la volonté générale, est le garant de l’ordre, le bouclier des citoyens contre toutes les formes de tyrannies et le portique de la démocratie.

  1. L’égalité des sujets devant le droit.

      L’égalité des sujets devant le droit constitue une des conditions de l’Etat de droit. Celui-ci implique en effet, que tout individu, que toute organisation, puissent contester l’application d’une norme juridique dès lors que celle-ci n’est pas conforme à une norme supérieure. Les individus et les organisations reçoivent par conséquent la qualité des personnes juridiques. On parle alors des personnes physiques dans un premier cas et des personnes morales dans le second.

  1. La protection des droits et des libertés individuelles.

« Si la démocratie bénéficie d’un prestige dans le monde actuel et si  elle est une aspiration des peuples, c’est qu’elle se ramène en définitive, à la protection des droits et libertés »57.

Par une sorte de positivisation ou juridicisation du droit naturel des droits fondamentaux dont la constitution est le vecteur, les droits fondamentaux sont devenus plus qu’un ensemble de règles fixées par la constitution et, irriguant l’ensemble du système juridique, du droit privé au droit public, ils incarnent l’un des fondements sur lesquels doit se construire et s’appuyer le pouvoir.

Le premier aspect de la limitation du pouvoir réside dans la référence aux droits et aux libertés individuelles. L’Etat de droit, dans une société démocratique, implique une certaine conception des rapports entre l’Etat et l’individu et une garantie des droits et libertés de ce dernier. « L’Etat de droit repose enfin de compte sur l’affirmation de la primauté de l’individu dans l’organisation sociale et politique, ce qui entraine à la fois l’instrumentalisation de l’Etat dont le but est de servir les libertés, et la subjectivisation du droit qui dote chacun d’un statut, lui attribue un pouvoir d’exigibilité et lui confère une capacité d’action ».58

      Sans perdre de vue l’intérêt général de la collectivité, l’Etat de droit accorde une place particulière à la défense de l’individu. Elle s’efforce de concilier l’intérêt général, égalité et liberté.

  1. L’indépendance de la justice.

L’indépendance du juge, c'est-à-dire son insubordination vis-à-vis des pouvoirs et des groupes de pression, est une donnée indispensable à la constitution de l’Etat de droit. Pour avoir une portée pratique, le principe de l’Etat de droit suppose l’existence des juridictions indépendantes, compétentes pour trancher les conflits entre les différentes personnes juridiques en appliquant à la fois le principe de l’égalité qui découle de l’existence de la hiérarchie des normes et le principe d’égalité qui s’oppose à traitement différencié des personnes juridiques.59

      Un tel modèle implique l’existence d’une séparation des pouvoirs et d’une justice indépendante.

      En effet, la justice faisant partie de l’Etat, seule son indépendance à l’égard des pouvoirs législatifs et exécutifs est à même de garantir son indépendance dans l’application des normes de droit.

      Ensuite, on ne sait pas parler aujourd’hui en République Démocratique du Congo d’une indépendance politique de la justice. Elle demeure que théorique malgré les efforts des organisations non gouvernementales tant locales qu’internationales à travers des sensibilisations et recommandations.

      Eu égard à ce qui précède, il est déplorable de constater que nous sommes encore loin d’un Etat de droit fort et solide car la question d’égalité des citoyens dans l’impunité ne trouve pas d’assise.

      Enfin, en ce qui est de la hiérarchisation des normes, certes qu’elle est effective et elle trouve au sommet la constitution qui malheureusement risque de perdre ses caractères suite à des révisions constantes et permanentes.

  1. LE CONTROLE JURIDICTIONNEL SUR LES GOUVERNANTS.

      Le contrôle juridictionnel des gouvernants suppose une justice indépendante. Pour se distinguer du totalitarisme, l’Etat de droit doit présenter certaines caractéristiques dont, en plus de la séparation des pouvoirs et la non rétroactivité des lois, l’existence d’un pouvoir judiciaire indépendant et la possibilité d’un contrôle de l’égalité et d’un contrôle de constitutionnalité effectif.

      En effet, pour que la fonction juridictionnelle soit effectivement une fonction de justice pour tous, il est nécessaire que, dans un Etat de droit, elle soit indépendante des autres fonctions étatiques.  L’indépendance de l’autorité juridictionnelle et le contrôle que cette autorité exerce sur les gouvernants constituent une garantie contre l’arbitraire du pouvoir et en réalité une limitation.

      Le contrôle juridictionnel fonde la possibilité de sanctionner les actes des autorités et d’engager leur responsabilité civile ou pénale, leur responsabilité politique étant engagée devant le peuple ou devant le parlement.

La responsabilité pénale est recherchée devant le juge pénal ou devant le juge constitutionnel. A travers ces différents contrôles, l’Etat de droit assure la lutte contre l’impunité et la transparence dans la gestion des affaires publiques.

§2. DE LA COUR DES COMPTES COMME INSTRUMENT DE LA BONNE GOUVERNANCE ET DE L’ETAT DE DROIT.

De prime abord, l’article 225 du règlement intérieur de l’assemblée nationale dispose : la cour des comptes contrôle, dans les conditions fixées par la loi, la gestion des finances de l’Etat, des biens publics ainsi que les comptes des provinces, des entités territoriales décentralisées et des organismes publics.  

      Les valeurs prédominantes de la bonne gouvernance telle que l’Etat de droit, la bonne gestion des ressources et la responsabilité précédemment développées, le recours aux services de la cour des comptes s’avère pertinent dans le cadre du contrôle parlementaire surtout en ce qui concerne la bonne gestion des ressources publiques.

Pour rappel, la cour des comptes de par sa nature juridique est à la fois un service public administratif et une juridiction administrative spécialisée. Elle soumet chaque année, à l’Assemblée nationale, avec ses observations, le compte général de la république, qui est toujours arrêté par une loi.[2] Dans ce cadre, la cour des comptes est l’expert financier de l’Assemblée nationale chargée par la constitution, de contrôler la gestion de l’Etat par le gouvernement et ses services. L’Assemblée nationale peut confier à la cour des comptes une mission de contrôle chaque fois qu’elle le juge utile. Dans ce cadre, la cour des comptes fait un rapport à l’Assemblée nationale dans le délai imparti. Le rapport est publié au journal officiel. ( article 127 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale).

C’est ainsi qu’il s’avère pertinent de parler sur le  contrôle de gestion (I) afin de mieux comprendre le contrôle budgétaire (II).

I. LE CONTROLE DE GESTION.

La cour des comptes contrôle la gestion des services de l’Etat et de tous les organismes et entreprises publics afin d’en apprécier la qualité et de formuler des suggestions sur les moyens susceptibles d’en améliorer les méthodes et d’en croire l’efficacité et le rendement.[3] A ce niveau la cour apprécie la réalisation des objectifs assignés, les moyens utilisés, les coûts des biens et services publics, les prix pratiqués et les résultats financiers. Il porte également sur la régularité et la sincérité des comptabilités ainsi que la matérialité de leurs opérations.

C’est ici que la cour des comptes a le pouvoir d’entendre tout dirigeant ou agent des services et établissements soumis à son contrôle ainsi que tous les membres des corps de contrôle comme l’inspection générale des finances, l’inspection générale de l’enseignement primaire et secondaire et les services d’audit au sein des organismes publics.[4]

II. LE CONTROLE BUDGETAIRE.

La commission économique et financière recueille trimestriellement les documents et les renseignements relatifs à l’exécution budgétaire en vue de permettre un contrôle efficace de l’exécution du budget de l’Etat[5].

Dans ce cas déterminé, la cour des comptes examine les pièces justificatives des recettes et dépenses effectuées au titre du budget général et des budgets annexes de l’Etat et des entités administratives décentralisées.

La cour procède ainsi en vue de rendre un arrêt du compte général de la république. La question budgétaire est d’une grande sensibilité dans la gestion des affaires de l’Etat et des provinces. En effet, la gestion des ressources publiques suscite beaucoup d’intérêt en même temps, qu’elle peut amener à beaucoup de faits répréhensibles. Par conséquent, le contrôle de la gestion du budget de l’Etat ou même des provinces mérite une attention particulière. Le rapport sur le compte général de l’Etat établi par les magistrats de la cour est examiné par la suite par la cour des comptes, siégeant toutes sections réunies. La cour des comptes se prononce alors sur la conformité ou non entre les comptes individuels des comptables et le compte général de l’Etat, des entités régionalisées, ou des entités administratives décentralisées selon le cas. Les décisions de la cour des comptes et ses annexes, accompagnés des observations sur l’exécution de la loi des finances sont transmis à l’Assemblée nationale, en même temps que le projet de loi portant arrêt du compte général de la république.

Des rapports particuliers peuvent également être établis par la cour des comptes pour faire observer certaines situations spécifiques sur les fautes de gestion dans le cadre de l’exécution budgétaire.

Disons ainsi qu’il s’agisse du contrôle budgétaire ou du contrôle de gestion, lorsque la cour des comptes révèle des faits susceptibles de constituer des infractions, le procureur général près la cour des comptes informe le général de la république qui saisira les cours et tribunaux.[6]

      Eu égard à ce qui précède, il nous est aisé de dire que la cour des comptes est un organe important dans le cadre du contrôle ; c’est un appui que le parlement, aurait dû exploiter au maximum pendant cette troisième république afin d’espérer voir la bonne gestion des ressources dans le chef du gouvernement et des gouvernants. Malheureusement, il s’avère contradictoire d’espérer que la cour des comptes serve d’un instrument de bonne gouvernance dans un Etat où la sanction n’est pas toujours certaine.              

[1] P. MUAMBA Tujibikile, Pour un vrai Etat de droit au lendemain des élections en RDC, Engagement social n° 21, Ed. L’EPIPHANIE, Kinshasa, janvier, 2008, P.33

60 Pasteur L.N. MULANGA, Manuel d’éducation à la citoyenneté et à la bonne gouvernance, Connaitre pour bien éduquer, 2e édition, PED /ECC, Bukavu, Mai, 2008, P.116.

61 T. MUHINDO M., Op. Cit., P.189

62 Pasteur L.N.MULANGA, op. cit., P.116

63 Pasteur L.N. MULANGA, Op. Cit., P. 116.

64 Ibidem, P.117

65 Rapport de PNUD, appui aux institutions, P.160

45 J. CHEVALIER, l’Etat de droit, Paris, Montchretien, 1999, p.7

46 T. MUHINDO MALONGA, Op. Cit., P.189

47 A. C. ROBERT, Naissance d’une mythologie juridique, in le monde diplomatique, janvier, 2001, P.22

48 T. MUHINDO M., Notes de cours droit constitutionnel, U.O.B, G1, Droit, 2010-2011, Inédit.

49 T. MUHINDO M., Op. Cit., P.192

50 J. CHEVALIER, Op. Cit., P.15

51 M.DELMAS-MARTY et C.L. de LEYSSAC, Libertés et droits fondamentaux, cité par Malonga, Seuil, paris, 1996, pp.9-10.

52 J. CHEVALIER, Op. Cit., P.16

53 T. MUHINDO M., Op. Cit., P.196

54 Idem, P.196

55 T. MUHINDO MALONGA, Op. Cit., P.198

56 T. MUHINDO MALONGA, Op. Cit. P.198.

57 T. MUHINDO M., Op. Cit., P.203

58 J. CHEVALIER, Op. Cit., P.55

59 J.P. ROBIN NAMEGABE, Notes de cours d’administration et développement, U.C.B., G3, droit, 2010-2011, Inédit.

[2] Art. 178 de la constitution de la RDC du 18 Février 2006, in JORDC, n° spécial, Kinshasa, mars, 2006.

[3] V. Te Pemako, Op. Cit., P.812

[4] Art. 47 de la loi n° 87-031 du 22 juillet 1987 portant procédure devant la cour des comptes, in JORDC, n° spécial, Août 1987.

[5] Article 193 du règlement intérieur de l’Assemblée nationale de la RDC.

[6] Arts.16 al.2 et 53 de la loi n° 87-031 du 22 juillet 1987 portant procédure devant la cour des comptes, in JORDC, n° spécial, septembre, 1987.

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