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CHAP I : REVUE DE LA LITTERATURE

Les APs sont définies comme : « des espaces géographiques clairement définis, reconnus, consacrés et gérés par tout moyen efficace, juridique ou autre, afin d’assurer à long terme la conservation de la nature ainsi que les services écosystémiques et les valeurs culturelles qui leurs sont associés » (Dudley, 2008a). 

Les APs forestières aident à conserver les écosystèmes qui fournissent un habitat, un abri, des aliments, des matières premières, du matériel génétique, une barrière contre les catastrophes naturelles, une source stable de ressources et de nombreux autres biens et services propres à l’écosystème. Elles jouent dès lors un rôle important en aidant les espèces, les populations et les pays à s’adapter aux changements climatiques (Mansourian et al.,2005a). En vertu de leur fonction de protection, ces forêts devraient rester exemptes de toute intervention humaine destructive. Elles pourront ainsi continuer à servir des réservoirs naturels de biens et de services pour l’avenir.

1.1 CATEGORIES       D’AIRES   PROTEGEES     ET    OBJECTIFS       DE GESTION

L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), le principal organisme international traitant d’aires protégées, a développé au cours des trente dernières années un système international de catégories de gestion d’aires protégées afin de guider leur planification et d’améliorer la gestion des informations (UICN, 1994b ; Dudley, 2008b).Plus globalement, il est possible de regrouper les catégories en deux groupes : les aires protégées strictes sans exploitation des ressources naturelles (I à IV) et les aires protégées plus polyvalentes avec exploitation des ressources renouvelables (V et VI).

1.1.1 AIRES PROTEGEES STRICTES, SANS EXPLOITATION DES RESSOURCES NATURELLES

Ia Réserve naturelle intégrale 

  • Conserver les écosystèmes exceptionnels, les espèces et la biodiversité, lesquels seraient dégradés par tout impact humain, sauf très léger.

Ib Zone de nature sauvage 

  • Protéger à long terme l’intégrité écologique d’aires naturelles qui n’ont pas été modifiées par des activités humaines, sont dépourvues d’infrastructures et où les processus naturels prédominent.
  • Parc national
    • Protéger la biodiversité naturelle, de même que la structure écologique et les processus environnementaux sous-jacents, et promouvoir l’éducation et la récréation.
  • Monument naturel
    • Protéger des éléments naturels exceptionnels spécifiques ainsi que la biodiversité et les habitats associés.
  • Aire de gestion des habitats ou des espèces
    • Maintenir, conserver et restaurer des espèces et des habitats.

1.1.2 AIRES PROTEGEES POLYVALENTES, AVEC EXPLOITATION DES RESSOURCES NATURELLES.

  • Paysage terrestre ou marin protégé

Protéger et maintenir d’importants paysages où l’interaction des humains et de la nature a produit, au fil du temps, une aire qui possède un caractère distinct et des valeurs considérables.  

  • Aire protégée avec utilisation durable des ressources naturelles

Protéger des écosystèmes naturels et utiliser les ressources naturelles de façon durable, lorsque conservation et utilisation durable peuvent être mutuellement bénéfiques.

1.2 IMPORTANCE DES AIRES PROTEGEES

Pendant plusieurs décennies, les aires protégées ont été considérées comme un outil essentiel pour la conservation de la biodiversité (Mansourian et al.,2005b). En plus elles sont les « pierres angulaires » des stratégies nationales et internationales de conservation (Triplet, 2009b).

De ce fait elles constituent le principal pilier des stratégies de conservation de la biodiversité.

Elles participent au développement d’activités humaines durables, en garantissant la fourniture de nombreux services écologiques à l’échelle locale et globale (alimentation, eau potable, médicaments). Elles sont également reconnues à l’échelle internationale comme des outils efficaces, économiques et durables pour lutter contre les changements climatiques (Anonyme, 2017b).

Selon les études menées par l’UICN en 2008, les aires protégées sont importantes pour : 

  • Conserver la composition, la structure, la fonction et le potentiel évolutif de la biodiversité ;
  • Contribuer aux stratégies régionales de conservation (réserves centrales, zones tampons, corridors, étapes-relais pour les espèces migratrices, etc.) ;
  • Préserver la biodiversité du paysage ou de l’habitat, des espèces et des écosystèmes associés ;
  • Maintenir, à long termes, de cibles de conservation spécifiées ;
  • Préserver à jamais les valeurs pour lesquelles elles ont été créées ;
  • Préserver les caractéristiques significatives du paysage, sa géomorphologie et sa géologie ;
  • Fournir des services écosystémiques régulateurs, y compris l’effet tampon contre les impacts des changements climatiques ;
  • Conserver les zones naturelles et scéniques d’importance nationale et internationale à des fins culturelles, spirituelles et scientifiques ;
  • Distribuer aux communautés locales et résidentes des bénéfices en accord avec les autres objectifs de la gestion ;
  • Offrir des avantages récréatifs dans le respect des autres objectifs de la gestion ;
  • Faciliter les activités de recherche scientifique qui ont un faible impact, et un suivi écolo0gique lié et cohérent par rapport aux valeurs de l’aire protégée ;
  • Utiliser les stratégies de gestion adaptative pour améliorer peu à peu l’efficacité de la gestion et la qualité de la gouvernance ;
  • Aider à fournir des opportunités éducatives (y compris au sujet des approches de gestion) ; - Aider à gagner le support général à la protection.

En plus de ce qui précède, les APs contribuent à la réduction de la concentration du CO2 dans l’atmosphère. En diminuant la concentration de ce gaz, l’un des principaux moteurs de l’effet de serre, les APs contribuent dans la mitigation du réchauffement climatique (Nsabimana, 2009).

1.3 MENACES SUR LES AIRES PROTEGEES

Selon certaines estimations, la superficie forestière mondiale aurait diminué d’environ 1,8 milliard d’hectares sur les 5 000 dernières années (une baisse équivalant à près de la moitié de la superficie forestière totale d’aujourd’hui).  Cette perte de superficie forestière est en lien avec des accroissements démographiques et la demande de terres pour les cultures et le pâturage, ainsi qu’avec une exploitation non durable des ressources forestières (Imani,2016). 

En plus, les causes de diminution de ces superficies forestières sont d’origine variées. Elles peuvent être d’origine naturelle comme le volcanisme, le feu de brousse, … ou d’origine anthropique (Bulonza,2016).

En dehors de ces menaces qui apparaissent être directes, il en existe d’autres liés aux activités humaines mais dont les impacts sur les forêts et/ou les aires protégées ne sont que indirectes. 

Il s’agit, à titre d’exemple, de la démographie galopante, la pauvreté, l’existence sans cesse des conflits armés, …

1.4 INDICES       DE    L’ANTHROPISATION         DANS         LES AIRES PROTEGEES

Doumenge (2001) cite, parmi les activités s’exerçant sur les APs, les cas de la déforestation, la collecte de bois de feu, la conversion des écosystèmes forestiers en terres agricoles, la chasse principalement autour des villes et dans les zones rurales à fortes densité de population, ….

1.4.1 La déforestation

La déforestation est définie comme l’affectation de la terre forestière à une utilisation différente ou encore la réduction à long terme du taux de couverture de la canopée en dessous du seuil de 10 % (Kanninen et al., 2007).  

Cependant le développement de l’agriculture, les infrastructures de transport, l’exploitation forestière, la production du charbon de bois et l’industrie minière sont définies comme les facteurs principaux de destruction des écosystèmes forestiers à travers le monde. Mais le degré d’impact de chaque facteur varie d’un continent à un autre (Tchatchou et al., 2015).

Plusieurs auteurs s’accordent à dire que les écosystèmes forestiers du Bassin du Congo sont relativement bien préservés. Le taux de déforestation y est de 0,17 %, ce qui est largement en deçà du rythme amazonien où ce taux atteint 0,4 % par an (Demaze, 2007). Jusqu’à présent, le taux moyen de déforestation en RDC demeure relativement bas (entre 0,2 et 0,3% par an) par rapport à la moyenne mondiale (0,6% par an) (Hansen et al., 2011 ; Ernst et al., 2012).

1.4.2 La collecte de bois énergie

Le bois est et restera encore pour longtemps la principale source d’énergie domestique pour de nombreuses familles urbaines et la quasi-totalité des familles rurales. La production d’énergie - bois est largement artisanale et pratiquement incontrôlée. Elle constitue une des causes de la destruction des forêts, particulièrement celles les plus accessibles situées autour des centres urbains et le long des voies de communication (FAO,1999).

De ce fait le bois de feu et le charbon de bois représentent 90 % de tous les prélèvements de bois dans les écosystèmes forestiers d’Afrique et un tiers de la production mondiale de bois énergie (FAO, 2011a). Cependant, dans le pays à faibles revenus, les extractions de bois en général ont augmenté légèrement de 1990 à 2011(FAO,2015).

En République Démocratique du Congo, la population consomme en moyenne près de 55 millions de mètres cubes de bois ces dernières années sous forme d’énergie domestique. Ainsi le bois représente plus de 85 pour cent de la production et de la consommation comme source d’énergie (FAO, 2011b). Ce secteur constitue donc l’une des principales causes de la déforestation des forêts à côté de l’agriculture itinérante sur brûlis (Malele, 2012). Bien que le potentiel énergétique du pays soit énorme, il n’existe pas à court terme des sources alternatives d’énergie qui permettent de réduire la pression sur les aires protégées.

1.4.3 La recherche des terres agricoles

Le développement agricole bien que nécessaire induit des effets négatifs se traduisant par une déforestation accélérée s’il est mal contrôlé (FAO, 1999).

Dans le monde, en particulier en Afrique, la production agricole devient de plus en plus insatisfaisante à la demande de la population en pleine d’explosion démographique (Kouadio, 2006). La faible production de ces terres peut être due à diverses causes dont par exemple l’infertilité des sols (Fermont, 2009).

A l’égard de ce qui précède, des études menées par la FAO montre que 350 millions des écosystèmes forestiers dans le monde sont brulées chaque année (FAO, 2009) pour être transformées en terres agricoles. Ce qui entraîne des conséquences négatives dont la perte de la biodiversité et d’autres comme l’infertilité du sol (Louppe et al., 1995).  La pratique courante d’agriculture sur brulis est destructrice sur les écosystèmes forestiers ceci résultant des pénuries des terres dues à l’infertilité qui apparait de façon excessive.

1.4.4 La chasse

La quantité de gibiers récoltée chaque année dans le Bassin du Congo est évaluée à 5 millions de tonnes (Peres et Meenwing, 2002) alors qu’en RDC, plus d’un million de tonnes de viande de brousses sont consommés chaque année (Anonyme, 2017c).  

Une telle situation suscite des grandes préoccupations surtout que l’on sait que la majorité de ces gibiers est prélevée dans et/ou autour des aires protégées par les populations rurales généralement pauvres et qui utilisent des moyens de chasse à la fois traditionnels et modernes (importés des villes en échanges de la viande de brousse) pour rentabiliser leur activité (Mpamu, 2010a).

Cependant la principale cause de la perte de la faune sauvage dans le bassin du Congo est le commerce de la viande de la brousse, entrainé par un marché toujours croissant.  De ce fait la chasse de subsistance et la chasse commerciale, pratiques très répandues, représentent une menace importante pour la conservation de la faune dans les APs du bassin du Congo (Mpamu,2010). De façon alarmante ces activités font que les écosystèmes forestiers soient vides en biodiversité.

La chasse de la viande de brousse, est une pratique souvent illégale, et constitue la plus importante cause de prédation humaine sur la biodiversité et la menace principale pour la conservation à long terme (Wilkie et al., 1998 ; Walsh et al.,2003 ; de Merode et al., 2004 ;

Fa et al., 2005).  Cependant la croissance démographique et l’immigration associée aux opérations d’exploitation forestière et minière aggravent ces pressions.

Depuis quelques années, plusieurs inquiétudes dans les milieux scientifiques et du lobby international de la conservation pour la préservation de la biodiversité des forêts tropicales humides, relayées par les grands médias au niveau local, régional, national et international, ont fait émerger la notion de « bushmeat crisis ». La chasse commerciale est accusée de mettre en péril la vie animale dans les forêts d’Afrique centrale et, à terme, de menacer l’ensemble de cet écosystème (Fargeot, 2004). Bien que la chasse de subsistance et commerciale contribuent à l’équilibre alimentaire et procure de l’argent à la population vivant autour des forêts ; celles-ci ne sont pas durables et compromettent l’avenir des plusieurs espèces comme celles ayant un taux de reproduction faible à l’exemple de l’éléphant, gorille etc.

1.4.5 Exploitation minière

L’exploitation minière est une activité qui affecte la flore, la faune, le sol et l’air (Mukandirwa, 2008). Le continent africain renfermerait 30 % des réserves mondiales de minerais et dont au moins 60% se situerait dans le sous-sol forestier du Bassin du Congo (Edwards et al., 2014). 

L’exploitation de ces ressources minières se fait par l’octroi d’un permis d’exploitation minière. 

L’exploitation minière procure de l’argent, rend accessible les zones des forêts relativement intactes ; celle-ci n’est pas durable, une fois cette exploitation se passe de manière à ne pas réduire les risques environnementaux éventuels, elle affecte négativement le réseau hydrique, l’air et entraine d’énormes perte en biodiversité (Marquant et al., 2015).  

De ce qui précède l’exploitation minière présente d’impacts directs aussi qu’indirects.  Les impacts directs concernent le déboisement et les diverses pollutions touchant essentiellement le système hydrique, l’air et les terres. Les impacts indirects résultent de la construction des infrastructures de transport des minerais et de l’énergie, et de l’implantation des bases vie nécessaires au fonctionnement de la mine (Ernst et al., 2010).

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