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CHAPITRE III. PRESENTATION DES RESULTATS ET DISCUSSION

3.1. RESULTATS

3.1.1. Essais d’élevage

3.1.1.1. Taux de ponte

Après extraction des cannes à sucre des bacs où étaient placés les couples géniteurs, les œufs pondus par les femelles étaient comptés. Les données obtenues à cet effet sont les suivantes :

Graphique 1. Nombre d’œufs pondus par bac pour les 2 traitements

Soumises à l’analyse de variances, il ne se dégage cependant aucune différence significative entre les deux traitements (F=2.56 ; P>0.05).

3.1.1.2. Eclosion des larves

Les données récoltées durant l’élevage quant au nombre de larves pour chacun des deux traitements (bâché vs non bâché) sont résumées dans la figure ci-dessous :

Graphique 2. Nombre de larves par bac pour les 2 traitements

 

Ces données brutes ont ensuite été soumises à l’analyse de variance. Les résultats obtenus à cet effet sont les suivants :

      Tableau 8. ANOVA du nombre de larves (bâché vs non bâché)

Source            DL      Σ carrés            CM             F           P

Facteur           1          0.4249            0.4249      11.76    0.004*

Erreur             14        0.5060                               0.0361

Total                15        0.9309

* Différence significative

Ces résultats révélant clairement une différence significative (F=11.76 ; P=0.004) entre ces deux traitements pour le nombre de larves invitent à comparer leurs moyennes par la méthode de Tukey.

Les résultats obtenus à cet effet sont les suivants :

Tableau 9.  Tukey pour le nombre des larves à l'éclosion

          N                 Moyenne     Groupement (*)

Bacs bâchés            8                 1.2463                 A

Bacs non bâchés     8              0.9203                                 B

 

(*) Les moyennes ne partageant aucune lettre sont sensiblement différentes.

3.1.1.3. Taux de mortalité

Par rapport aux mortalités, les données obtenues sont résumées dans le graphique que voici :

Graphique 3. Mortalités par bac pour les 2 traitements

Cependant, après analyse de variances des données brutes, aucune différence significative n’a été dégagée entre ces deux traitements (F=1.28 ; P>0.05) ; ce qui invite à la conclusion que le taux de mortalité entre les deux traitements est similaire.

3.1.2. Enquête de consommation

3.1.2.1. Résultats démographiques

 
 

A l’issue du travail d’enquête, le dépouillement des données obtenues révèle que les proportions des différentes classes d’âge (entre lesquelles se repartissent les répondants dont 50.0% ♂ vs 50.0%♀) se présentent comme illustré par le graphique suivant :

 
   

       Graphique 4. Répartition des répondants en classes d’âge (n=60)

Par ailleurs, interrogés sur leur niveau d’études, 53.3% des répondants affirment avoir une formation universitaire contre 25.0% pour les humanités et 1.7% pour les études secondaires. A ce nombre, il faut ajouter 20.0% de répondants qui disent avoir eu d’autres types de formation professionnelle (de type cycle court).

Quant aux activités professionnelles, la situation obtenue sur base des données récoltées est mieux illustrée par le graphique que voici :

% de répondants

 

     Graphique 5. Répartition des répondants par profession (n=60)

3.1.2.2. Habitudes alimentaires

A l’issue du dépouillement des données, il se révèle que 81.7% des ménages interrogés consomment au moins une espèce d’insectes (1 à 2 fois par semaine tant pour les ♂ que pour les ♀), contre 18.3% qui n’en consomment pas. Ces chiffres permettent donc d’apprécier à quel point la consommation d’insectes – l’entomophagie – est bien intégrée dans les habitudes alimentaires de la population de la commune de Masina.

Cette très bonne intégration des pratiques entomophages au sein de la population de cette partie de la Capitale est pour sa part justifiée et motivée par différentes raisons dont les principales sont : (i) les habitudes alimentaires que les répondants ont développé (pour 25.0% des personnes) ; (ii) la bonne teneur en protéines (pour 16.7%) ; (iii) le goût (pour 16.7%) ; (iv) des raisons liées à la santé (pour 11.7%) ;  (v) à divers éléments minéraux (8.3%) ou aux lipides précisément (1.7%) et en dernier lieu à la coutume (1.7%). La proportion restante (soit 18.3%) n’a avancé aucune raison particulière.

L’enquête a également permis de mettre en lumière les principaux ordres d’insectes consommés par la population d’étude. Il y apparaît clairement la prédominance des Lépidoptères (43.1%) sur tous les autres ordres d’insectes confondus (graphique 6).

La présente étude précise par ailleurs que ce sont des chenilles communément appelée « Mbinzo » (Cirina forda) qui tiennent la tête de liste (soit 34.0%) dans ce panel d’insectes comestibles suivis ; à proportions égales, par des « Makelele » (Brachytrupes membranaceus) puis des « Makokolo » (Augosoma centaurus) (graphique 7).

  Graphique 6. Distribution des insectes consommés par ordres

                    Graphique 7. Distribution des insectes consommés par espèces

Afin de mieux dégager la contribution des insectes à la lutte contre l’insécurité alimentaire, l’enquête s’est également intéressée à déterminer la place qu’occupent les produits carnés dans les habitudes alimentaires de la population sous étude. Il y apparaît nettement la prédominance de la consommation du poisson (3 à 4 fois/semaine) comme l’illustre le graphique ci-dessous :

 
   

En rapport avec les objectifs de la présente étude, l’enquête s’est également intéressé à déterminer l’acceptabilité des insectes comestibles produits en conditions d’élevage (ex situ) face à ceux récoltés in natura. Interrogés à cet effet, seul 30.0% des répondants se disent disposés à en consommer contre 68.3% qui n’en acceptent pas la possibilité (avançant surtout des raisons liées à la peur -  31.7% ; à la méconnaissance des conditions d’élevage - 31.7% ou à des risques sur la santé – 5.0%).

Les raisons avancées par les répondants ouverts à cette possibilité sont entre autres que les insectes produits dans de telles conditions bénéficieraient d’un suivi régulier et bien meilleur (pour 8.3%) ou qu’ils seraient plus riches en éléments minéraux (5.0%).

Interrogés sur les différences  - quant au goût, à la qualité nutritive ou au prix  entre ces deux types d’insectes comestibles; l’enquête a permis de dégager pour 61.7% des répondants que des insectes produits dans ces deux types de conditions (ex situ vs in natura) présenteraient des différences (contre 21.7% qui estiment qu’ils seraient identiques). Ainsi :

  • Pour 55.0% des personnes interrogées, les insectes produits en élevage auraient un goût inférieur à ceux récoltés in situ contre 11.7% pour un goût identique et 1.7% pour un goût supérieur ;
  • Pour 60.0% d’entre eux, leur qualité nutritive serait inférieure à celle des insectes récoltés en pleine nature, contre 10.0% pour une qualité égale et 8.3% pour une qualité supérieure ;
  • Pour 36.7% de répondants, leur prix serait inférieur à celui pratiqué actuellement pour les insectes récoltés en pleine nature, contre 30.0% pour un prix supérieur et 25.0% pour un prix identique.

Enfin, en réponse à la question des avantages de l’élevage des insectes par rapport à leur récolte en pleine nature, ci-après la synthèse des avis des répondants :

Graphique 9. Avantages de l’élevage face à la récolte in natura

3.2. DISCUSSION

Les résultats obtenus à l’issue de nos essais d’élevage de Rhynchophorus phoenicis permettent de mieux comprendre la réponse de cet insecte aux conditions d’élevage auxquelles il a été soumis (bacs bâchés vs bacs non bâchés).

En effet, en comparant les données récoltées pour chacun des paramètres retenus pour ces essais (taux de ponte, éclosion et mortalité) ; les analyses de variances n’indiquent aucune différence significative que pour le nombre de larves quant à ces deux traitements (F=11.76 ; P=0.004) (Tableau 8). Le test de Tukey confirme pour sa part indique que les bacs bâchés présentent des effectifs significativement supérieurs à ceux des bacs non bâchés (cf. Tableau 9).

Même si la femelle R. phoenicis pond autour de 1.000 œufs tout au long de son cycle de vie, il est bien connu cependant que la mortalité reste généralement élevée (plus de 50% en moyenne). C’est en réponse à cette préoccupation que la technique étudiée dans ce travail peut se révéler pertinente. Nos résultats apportent ainsi un complément d’informations qui peut modestement améliorer la productivité des élevages ex situ.

Pour sa part, l’enquête de consommation menée auprès de la population dont les caractéristiques démographiques ont été présentées (cf. point 3.1.2.1.) a également enrichi la compréhension (i) des habitudes alimentaires des habitants de cette partie de la capitale et (ii) de la place qu’occupent les insectes comestibles dans la lutte contre l’insécurité alimentaire à Kinshasa.

En effet, l’entomophagie apparait très bien intégrée au sein des ménages étudiés (à hauteur de 81.7%), ce qui rejoint et précise par ailleurs les chiffres avancés par NSEVOLO (2012) pour la Ville-province de Kinshasa et MAPUNZU (2002) pour tout le territoire national.

Les conclusions auxquelles nous sommes arrivés quant aux principales motivations (les habitudes alimentaires) justifiant l’entomophagie et les principales espèces consommées (les Lépidoptères) rejoignent également celles de ces deux auteurs qui ont aussi mis en lumière la contribution des us et coutumes dans l’acceptabilité des insectes comme aliment, mais également les raisons liées à leurs fortes teneurs en protéines notamment. D’ailleurs, ces teneurs en macronutriments justifient en grande partie le regain d’intérêt qui leur est consacré aujourd’hui un peu partout dans le monde (MALAISSE, 2005).

S’inscrivant avec modestie dans cette grande problématique qu’est l’entomophagie, la présente étude a également apporté une contribution originale, notamment sur la question de l’acceptabilité des insectes produits en conditions d’élevage : la consommation de ces derniers semble encore quelque peu rédhibitoire pour 68.3% des personnes interrogées (pour des raisons liées à la peur -  31.7% ; à la méconnaissance des conditions d’élevage - 31.7% ou à des risques sur la santé – 5.0%). Par ailleurs, la majorité des répondants attribuent à ces insectes un goût et des qualités nutritives inférieurs à ceux récoltés in natura.

Même si la véracité de telles allégations ne saurait être vérifiée objectivement (sans passer par des analyses de leur composition chimique et de leur qualité organoleptique), elles ont néanmoins le mérite d’attirer notre attention sur le parcours qui reste encore à faire (en termes de recherche et auprès des consommateurs notamment) avant d’arriver ; comme l’a souhaité HARDOUIN (2003) à une véritable zootechnie de R. phoenicis.

 

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