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Chapitre II. PRESENTATION ET ETUDE THERMODYNAMIQUE DU REFRIGERATEUR

II.1. INTRODUCTION

La conception optimale d’une machine frigorifique à adsorption nécessite le choix efficace de ses paramètres de fonctionnement : couple adsorbant/adsorbat, les températures et pressions d’utilisation (températures et pressions au condenseur et évaporateur, et la température de génération), en accord avec les contraintes et objectifs en cause.

C’est dans cet angle que ce chapitre se propose d’une part, par une analyse des critères de choix d’un adsorbant et d’un adsorbat, et la revue des couples couramment utilisés, de justifier le choix du couple qui sera utilisé dans notre frigo. D’autre part, toujours dans le cadre d’optimisation, une étude et une analyse du cycle de base de Clapeyron associé à cette machine sont nécessaires. Pour ce faire, après une présentation sommaire du phénomène thermodynamique de l’adsorption, nous avons établi un modèle numérique basé sur l'équation d'état du modèle de Dubinin et Radushkèvich [10].

Le code de calcul élaboré permet d'apprécier l'influence de divers paramètres sur la quantité de froid produite à l’évaporateur, sur le coefficient de performance thermique de la machine et la quantité de la masse cyclée de l’adsorbat dans la machine.

II.2. PRÉSENTATION

II.2.1. Définitions [7]

II.2.1.1. Adsorbant

Les adsorbants sont des matériaux poreux ayant des tailles des pores variant de quelques angströms à quelques centaines d’angströms. Les adsorbants couramment utilisés sont le gel de silice, l’aluminium activé, les charbons actifs ainsi que les adsorbants à tamis moléculaires comme les zéolithes. La caractéristique la plus importante des adsorbants est leur grande capacité d’adsorption due à la structure microporeuse de la surface de l’adsorbant qui peut être décrit par plusieurs paramètres physiques. En particulier, il s’agit de la distribution volumique des pores et la surface spécifique. Le tableau I.2 donne les caractéristiques physiques des adsorbants.

Tableau II.1 : Les caractéristiques physiques des adsorbants

Adsorbant

Surface spécifique (m2.g-1)

Taille des pores (nm)

Porosité interne (nm)

Charbon actif

400 à 2000

1,0 à 4,0

0,4 à 0,8

Zéolites

500 à 800

0,3 à 0,8

0,3 à 0,4

Gels de silice

600 à 800

2,0 à 5,0

0,4 à 0,5

II.2.1.2. Adsorbat : 

Les adsorbats sont des matériaux qui ont des molécules de petite taille (qui sont fixées par l’adsorbant = substance adsorbée). Les caractéristiques les plus importante des adsorbats sont : la chaleur latente, le volume spécifique, la pression de saturation, la stabilité avec l’adsorbant utilisée et l’impact sur l’environnement.

II.2.2. Critères de choix du couple adsorbant/adsorbat [7,10]

Le choix du couple adsorbant/adsorbat est très important. Il se fait en fonction des niveaux de pressions et températures de l'utilisation frigorifique envisagée (réfrigération, conservation des aliments, climatisation, pompe à chaleur ou stockage d'énergie), la complexité dans la manipulation et les soucis environnementaux, etc. Pour une application donnée, le choix du couple adsorbant/adsorbat (solide-gaz) repose essentiellement sur le cycle thermodynamiques de fonctionnement du système.

II.2.2.1. Choix de l’adsorbant

Les adsorbants sont souvent choisis en fonction de leurs capacités d'adsorption et leurs fortes conductivités thermiques. La capacité d'adsorption doit être plus élevée à basse température et à la pression d'équilibre dans l'évaporateur. Par contre, elle doit être faible à la haute température du cycle associée à la pression d'équilibre dans le condenseur. Comme l'adsorption est un phénomène surfacique, le choix se porte sur l'adsorbant microporeux de plus grande surface spécifique (charbons actifs, zéolithes, gel de silice et alumines activées).

II.2.2.2. Choix de l’adsorbat

Le choix de l'adsorbat est fait de sorte qu'il doit:

  • avoir une forte chaleur latente de vaporisation ;
  • une petite taille des molécules pour faciliter le phénomène d’adsorption ;
  • non toxique, non inflammable et non corrosive ;
  • une faible valeur de la pression de saturation (légèrement supérieure à la pression atmosphérique) ;
  • être facilement adsorbable à basse température et plus difficilement adsorbable à haute température.

Les adsorbants couramment utilisés dans les systèmes à adsorption peuvent être classés par ordre décroissant de la chaleur latente de vaporisation. Il s'agit de l'eau, l'ammoniac et les alcools primaires (méthanol, éthanol).

II.2.2.3. Critères thermodynamique

Ce choix doit prendre en considération :

  • les températures d'ébullition et de condensation du frigorigène qui doivent être voisines des températures externes du cycle de fonctionnement de la machine correspondant

respectivement à la haute et à la basse pression du système ;

  • la température critique de l’adsorbat qui doit être la plus élevée possible ;
  • la chaleur isostérique de désorption, qui est la quantité d'énergie nécessaire pour rompre les liaisons réversible entre les molécules de l'adsorbat et la surface de l'adsorbant, qui doit être la plus faible possible ;
  • l'adsorbant qui doit avoir une chaleur spécifique la moins élevée possible ;
  • l’adsorbat doit avoir une tension superficielle et une viscosité les moins élevées possible.

II.2.2.4. Critères techniques

Pour une meilleure fiabilité du système, le choix technique doit prendre en considération:

  • la stabilité chimique du couple surtout à haute température de fonctionnement ;
  • la corrosion qui peut être due à la réactivité du couple avec les matériaux des composants et des canalisations de la machine ;
  • la solidification du fluide frigorigène à basse température ; – la toxicité des fluides et l'inflammabilité des matériaux utilisés.

II.2.2.5. Critères de sécurité

Dans le choix de sécurité, deux paramètres fondamentaux sont à respecter : – la toxicologie de chacun des éléments du couple (contrainte écologique) ; – l’inflammabilité des éléments de la machine.

II.2.2.6. Les couples les plus utilisés en machines frigorifiques à adsorption [7]

Il existe trois principaux couples adsorbants/adsorbats utilisés dans la production du froid : Zéolithe/Eau, Charbon Actif/Méthanol et Gel de Silice/Eau.

  1. Le couple Zéolithe/Eau

Les zéolithes sont des matériaux cristaux poreux d’aluminosilicates d’origine naturelle. La structure primaire consiste en un assemblage de tétraèdres de SiO4 et d’AlO4. On les trouve sous  types X (rapport Si/Al de 1 à 1,5) ou Y (rapport Si/Al de 1,5 à 3). Les zéolithes se présentent sous forme de billes brunes/blanches ou de poudre. Elles peuvent adsorber des molécules organiques et minérales en phase gazeuse. Certaines zéolithes ont une grande affinité pour l’eau, cela se traduit par une capacité d’adsorption pouvant atteindre jusqu’à 30% en poids et ce, sans aucune variation de leurs volumes. La régénération a lieu en éliminant l’eau par des effets de pression et/ou de température. 

Dans le domaine de la production de froid, la zéolithe de type 13X (porosité 13 angströms) est le plus utilisée, elle se présente sous forme de billes de 1,5 à 2,5 mm et se compose de 15 à 20% d’argile. Avec initialement 25% d’eau, elle s’active par chauffage dans un four à 360 °C. Si celle-ci est bien activée, elle produit une réaction très exothermique lorsqu’on la plonge dans l’eau. Les zéolithes ne présentent aucun danger particulier. Elles peuvent se détériorer au contact de solutions basiques ou acides. Elles peuvent utiliser aussi le méthanol  comme absorbat.

L’eau est un frigorigène parfaitement disponible, possède de bonnes propriétés thermiques mais sa pression de fonctionnement est faible (20 à 80 mbar), et sa gamme de température de production de froid est réduite (0 à 10°C). Plus généralement, l’eau est un fluide «idéal» d’un point de vue de sa toxicité et de son empreinte environnementale.

  1. Le couple Charbon actif/Méthanol

Le charbon est dit « actif » parce que on y a créé une porosité à l’intérieur  grâce à de l’acide phosphorique ou de la vapeur d’eau. Il peut être obtenu à partir d’un grand nombre de matériaux carbonés (bois, charbon, noix de coco, résidus pétroliers, etc.), par des processus de carbonisation suivis des processus d’activation dûment contrôlés. Le charbon activé est une poudre noire, légère, très salissante. Sa très grande surface spécifique lui confère un fort pouvoir adsorbant : un gramme de charbon actif a une surface spécifique comprise entre 400 et 2000 m2. Il est hydrophobe. L’adsorption des gaz nécessite des pores de 1 à 2 nm, alors que des pores de 2 à 10 nm suffisent pour l’adsorption des liquides. 

Le méthanol (CH3OH) est un gaz toxique, incolore, et alcalin. Dans des conditions normales de température et de pression, la chaleur latente d’évaporation est importante, presque égale à la moitié de celle de l’eau et son point d’ébullition est d’environ 65°C. Sa gamme de température pour produire le froid est comprise entre -15°C et 10°C, ce qui en fait un fluide frigorigène intéressant. Ses petites molécules, de l’ordre de 4Å peuvent être facilement adsorbées dans les micropores du charbon actif. La pression de fonctionnement est faible (5 mbar à 100 mbar). Par rapport aux autres adsorbants, son énergie de liaison adsorbat/adsorbant est généralement plus faible, ce qui diminue l’énergie nécessaire pour la phase de régénération. Le Charbon actif présente aussi une faible sélectivité (capacité à séparer deux composée), du fait de sa grande distribution de la taille des pores. Cependant Cette grande distribution permet d’adsorber de nombreuses espèces chimiques, et en particuliers beaucoup de composés organiques volatils. 

Le charbon actif peut utiliser aussi comme adsorbat : l’éthanol, l’ammoniac et  le CH3NH2. c) Couple Gel de Silice/Eau  

Le Gel de Silice (SiO2.NH2O) est un silice synthétique amorphe, dont la structure des pores, créée par l’agglomération des microparticules sensiblement sphériques de dimension à peu près uniforme et comprise entre 2 et 20 nm. Cette structure est responsable de la grande surface spécifique, typiquement 600 à 800m2/g. Il est hydrophobe et présente l’avantage d’adsorber l’humidité. Il est présent dans certains bouchons dessiccateurs et il est aussi utilisé comme agent asséchant pour les caméras, les films, les chaussures, etc.

Le Gel de Silice a une grande capacité d’adsorption de l’eau (400 g/kg) à une pression de vapeur d’eau proche de la saturation, donc il est largement utilisé avec l’eau comme couple pour la production du froid.

C’est le couple Gel de silice/Eau qui a été choisi dans le cadre notre travail, parce que c’est lui qui répond le mieux à nos objectifs en accord avec les contraintes technologiques, environnementales et de sécurité (non toxique, grand pouvoir adsorbant,…).

II.2.3. Cycle de base d’une machine frigorifique à adsorption *1-3, 7, 10, 15]

La machine frigorifique à adsorption fonctionne par cycle. La figure II.1 représente le trajet thermodynamique de base d’une telle machine dans le diagramme de Clapeyron (ln P, -1/T). Ce cycle dit idéal, représente l’évolution de l’état de mélange adsorbant/adsorbat contenu dans l’adsorbeur. Chaque cycle comprend deux phases principales régissant le fonctionnement : une phase de chauffage du mélange adsorbant/adsorbat et une autre de refroidissement du même mélange (figure II.2).

Figure II.1 : Trajet du cycle frigorifique de base sur le diagramme de Clapeyron [10]

II.2.3.1. Phase de chauffage

  1. Phase de chauffage isostérique (12)

Au début du cycle (point 1), le mélange adsorbant/adsorbat est à sa température minimale Ta (température d’adsorption) et à la pression Pe (pression d’évaporation) ; à ce moment, l’adsorbeur est isolé. Sous l’effet de chauffage, la pression et la température du mélange augmentent, tandis que la masse totale du réfrigérant adsorbée reste constante le long de la transformation (1→2) et égale à mmax. Cette phase de pressurisation s’achève dès que la pression devient égale à celle qui règne dans le condenseur Pc (point 2). La température atteinte est dite température seuil de désorption Tc1.

  1. Phase de désorption - condensation (23)

Cette phase commence lorsque la pression du mélange dans l’adsorbeur atteint la pression de condensation Pc (pression de saturation correspondante à la température de condensation), l’adsorbeur est mis en communication avec le condenseur et la désorption du frigorigène commence, celui-ci se condense dans le condenseur par la suite. L’adsorbeur est alors en haute pression et suit l’isobare imposée par le condenseur. Tout en continuant le chauffage, la température du mélange dans l’adsorbeur augmente jusqu’à la température maximale Tg (température de régénération) au point 3, fixée pour le cycle correspondant. Cette phase est généralement appelée génération car c’est celle qui rend l’adsorbeur propice à une nouvelle phase de production frigorifique.

II.2.3.2. Phase de refroidissement

  1. Phase de refroidissement isostérique (34)

Par opposition à la première phase, le refroidissement du mélange adsorbant/adsorbat commence au point 3, où la température et la pression diminuent jusqu’à ce que la pression devienne égale à celle qui règne dans l’évaporateur. La température atteinte est dite température seuil d’adsorption Tc2 (point 4). La masse totale du fluide adsorbée reste constante dans cette phase et est égale à mmin.

  1. Phase d’adsorption - évaporation (41)

Cette phase est la phase motrice du cycle, phase pendant laquelle le froid est produit. Au point 4, commence l’évaporation du réfrigérant en produisant le froid dans l’évaporateur. La vapeur produite s’adsorbe de nouveau dans l’adsorbeur, jusqu’à ce que la température du mélange adsorbant/adsorbat devienne minimale Ta, fixée pour le cycle correspondant. Durant la transformation (4→1), le système suit l’isobare imposée par l’évaporateur, et qui correspondant à la pression de saturation du réfrigérant à la température d’évaporation. À ce moment, la machine est prête pour un nouveau cycle. Le cycle thermodynamique est totalement défini par les quatre températures de fonctionnement : 

  • Ta : température minimale atteinte par le mélange adsorbant/adsorbat (température d’adsorption) ;
  • Tg : température maximale atteinte par le mélange adsorbant/adsorbat (température de régénération) ;
  • Tc : température de condensation ; – Te : température d’évaporation.

La conception et les choix technologiques des machines frigorifiques à adsorption sont guidés par la volonté d’une optimisation de ce quadruplet de température. Vu l’alternance des phases (désorption-condensation et évaporation-adsorption), l’évaporation n’a lieu que pendant une partie du cycle, c’est pourquoi ce cycle est appelé intermittent. Cette intermittence peut bien s’adapter et se synchronisée avec une source énergétique solaire, elle aussi intermittente.

Un cycle réel s’éloigne un peu de cette description, pour les raisons suivantes:

  • les gradients de température et de concentration existants principalement dans les phases de chauffage et de refroidissement isostérique (1→2 et 3→4) produisent, en fait, plusieurs lignes correspondant aux différentes parties du lit poreux. Pour cette même raison le seuil de désorption ou d’adsorption ne correspond pas exactement à un seul point sur ce diagramme. Ainsi, le concept de pression seuil (au lieu de température seuil) est plus convenable pour la description du cycle réel ;
  • la pression dans le condenseur et l’évaporateur durant les phases isobares ((2→3) et (4→1)) est supposée constante. Tandis que dans le cas d’un condenseur à air, l’évolution de la température de condensation aura une allure proche de celle de la température ambiante. En ce qui concerne la pression de l’évaporateur, son évolution dépend également de l’application. Par exemple, si l’on utilise dans la chambre frigorifique un stockage de froid sous forme de chaleur latente, la température d’évaporation sera en principe constante ;
  • la machine réelle ne suit pas un cycle thermodynamique fermé, c'est-à-dire le cycle ne revient pas à son point de départ (point 1) à cause de la présence des pertes thermiques au niveau de l’adsorbeur durant les phases de refroidissement.

II.2.4. Avantage et inconvénients des machines à adsorption [10]

II.2.4.1. Inconvénients

Beaucoup d’inconvénients de ces machines sont devenus des obstacles pour la réelle mise en pratique globale du procédé et qui font actuellement l’objet d’études, nous citons:

  • le coefficient de performance thermique de ces machines est limité (< 0,5). Donc ce coefficient est plus faible que ceux des systèmes à compression et à absorption ;
  • fortes puissances thermiques à évacuer vers l’extérieur ;
  • basses pressions de vapeur avec les frigorigènes utilisés (eau et méthanol) ;
  • avec l’eau, l’impossibilité de produire du froid au-dessous de 0 °C ;
  • les performances du système de captation des machines frigorifiques solaires à adsorption sont particulièrement sensibles aux conditions environnementales (vent, température ambiante et rayonnement solaire), ce qui renforce le caractère aléatoire de la production frigorifique provenant du caractère fluctuant de l’énergie solaire ;
  • la production discontinue de froid imposant un accumulateur externe pour le stockage de l’énergie. Cette solution permet de pallier à la nature intermittente et aléatoire de l’énergie solaire, mais n’a pas encore reçu de succès économique satisfaisant. Le problème de discontinuité de production de froid peut être résolu en utilisant plusieurs adsorbeurs, ce qui augmente l’encombrement, le poids et le prix de la machine.

II.2.4.2. Avantages

Les machines frigorifiques à adsorption présentent comme avantages principaux:

  • l’absence de compression mécanique, donc pas de vibrations et de bruits ;
  • la possibilité d’utiliser une énergie calorifique disponible et d’éviter ainsi la consommation électrique du compresseur. Donc, ce sont des machine poly-énergie

(brûleur du propane, résistance électrique, énergie solaire, …etc.) ;

  • la parfaite autonomie ;
  • le procédé classique des machines à adsorption opère avec un seul adsorbeur, il présente certes l’avantage d’être simple technologiquement, ce qui lui confère les qualités de facilité d’entretien et de fiabilité dans le temps ;
  • l’intermittence du cycle de base associé à ces machines représente une caractéristique utile dans les applications solaires où l’énergie solaire n’est que discontinuellement disponible. Ces machines sont donc parfaitement adaptables à cette énergie ;
  • le fonctionnement intermittent permet de diminuer le nombre de composant du système ;
  • des coûts de fonctionnement et d’entretien très réduits ;
  • la durée de vie de ces machines peut être longue, si l’on s’est prémuni contre la décomposition du frigorigène et contre les phénomènes de corrosion.

Tous ces avantages des machines frigorifiques à adsorption sont des raisons qui nous ont amené à les sélectionner plus particulièrement dans notre travail de mémoire.

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